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Inaptitude et reclassement, quid du questionnaire ?

Publié dans le magazine Direction[s] n° 198 de juin 2021

Récemment, les juges ont admis que le questionnaire soumis à un salarié déclaré inapte permettait d’encadrer les recherches de reclassement de l’employeur. Retour et précisions sur cet outil des ressources humaines performant à condition d’être bien utilisé.

Par Bérénice Hauffray, Avocat

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L’ESSentiel – Mai 2021

Le 29ème numéro de l’ESSentiel, la newsletter en droit du travail pour les employeurs du secteur, est disponible !

Au menu de cette édition, la question du maintien des instances représentatives du personnel conventionnelles depuis la mise en place du CSE, l’égalité de traitement face aux avancées de la mission Laforcade, les derniers agréments, les précisions ministérielles (ou pas) concernant la future PEPA, le nouveau registre des accidents bénins, l’obligation de sensibilisation aux gestes de survie, un décryptage des dernières jurisprudences et un focus sur l’autorisation d’absence pour enfant malade.

Bonne lecture !

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Vigilance sur le report de l’entretien préalable

Publié dans le magazine Direction[s] n° 197 de mai 2021.
Disponible en téléchargement PDF à la fin de l’article et consultable sur le site internet de Direction[s].

Dans le cadre d’une sanction ou d’un licenciement, une demande de report de l’entretien préalable, qu’elle soit à l’initiative du salarié ou de l’employeur, doit respecter certaines règles concernant la notification, les délais, la convocation… Dans tous les cas, la prudence est de mise.

La procédure applicable en matière de sanction disciplinaire ou de licenciement est particulièrement encadrée par le Code du travail. Toutefois, la loi ne règle pas la question, pourtant fréquente, du report de l’entretien préalable à une date ultérieure à celle initialement fixée. Il est donc revenu aux juges d’en fixer les modalités et conséquences. En pratique, l’employeur doit faire preuve d’une particulière vigilance quant à l’impact du décalage de l’entretien sur les délais applicables.

Délai de prescription des fautes

Selon la loi, « aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales »[1]. L’acte d’engagement des poursuites disciplinaires correspond à la date d’envoi de la lettre de convocation (le cachet de La Poste faisant foi) et non de sa réception ou de sa première présentation.

La lettre de convocation a ainsi pour effet d’interrompre le délai de prescription de deux mois[2], de sorte qu’un nouveau délai de même durée court à compter de la date d’envoi. Attention, l’interruption ne doit pas être confondue avec la suspension, qui est le fait d’arrêter le cours d’un délai jusqu’à un évènement déterminé. En effet, ni la maladie du salarié, ni sa demande de report de l’entretien – quelle qu’en soit la raison – n’a pour effet de suspendre la procédure disciplinaire[3]. C’est d’ailleurs pour cette raison que l’employeur n’est pas tenu, sauf dispositions conventionnelles contraires, de faire droit à la demande de report de l’entretien formulée par le salarié, même s’il est malade[4].

Par conséquent, lorsque l’entretien préalable est reporté, à la demande du salarié ou à l’initiative de l’employeur, ce dernier a deux mois à compter de la date d’envoi de la première lettre pour « reprendre la procédure », c’est-à-dire pour adresser une nouvelle convocation[5].

Attention. La jurisprudence a pu, à la marge, adopter une position semble-t-il contraire dans des affaires où il a uniquement été tenu compte de la date de la première convocation, indépendamment de la seconde convocation envoyée[6]. En tout état de cause, la célérité est de mise : une convocation tardive, indépendamment de la régularité de la procédure, est susceptible de nuire à la qualification de la faute grave qui est celle rendant impossible la poursuite immédiate du contrat de travail. En effet, sauf à ce qu’une vérification soit nécessaire, la mise en œuvre du licenciement pour faute grave doit intervenir dans un délai restreint à compter de la découverte des faits fautifs[7].

Le délai minimum entre la convocation et l’entretien

● Pour un entretien préalable au licenciement

Lorsque le salarié demande le report de son entretien préalable au licenciement et que l’employeur l’accepte, le délai de cinq jours ouvrables obligatoire entre la réception de la convocation et l’entretien[8] court à compter de la présentation de la lettre recommandée ou de la remise en main propre de la convocation initiale[9]. En telle hypothèse, l’employeur n’a d’ailleurs aucune obligation d’adresser une nouvelle convocation respectant les formes légales : il est simplement tenu d’aviser, en temps utile et par tout moyen, le salarié des nouvelles date et heure de cet entretien[10].

Au contraire et par précaution, lorsque l’entretien préalable au licenciement est reporté à l’initiative de l’employeur, il convient de respecter un nouveau délai de cinq jours ouvrables à compter de la première présentation de la nouvelle convocation.

● Dans le cas d’un entretien préalable à une autre sanction

Sous réserve des dispositions conventionnelles applicables, lorsque la sanction envisagée n’est pas un licenciement, aucun délai entre la réception de la convocation et l’entretien n’est fixé par la loi. La jurisprudence exige toutefois un « délai suffisant »[11] apprécié au cas par cas, de sorte qu’il est préconisé de respecter le même délai minimum de cinq jours ouvrables. Pour les structures appliquant les conventions collectives du 31 octobre 1951, du 15 mars 1966 et ou les accords CHRS, il conviendrait de respecter le délai de cinq jours ouvrables prévu en matière de licenciement dans la mesure où la sanction peut avoir à terme un effet sur la présence du salarié dans la structure (voir encadré).

Le délai de notification

La sanction disciplinaire ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables, ni plus d’un mois après le jour fixé pour l’entretien[12].

Lorsque cet entretien a fait l’objet d’un report, il convient de distinguer deux situations :

  • Si l’entretien préalable a été reporté à la demande du salarié ou en raison de l’impossibilité pour celui-ci de se présenter au premier entretien, le délai d’un mois pour notifier la sanction court à compter du nouvel entretien ;
  • Si l’entretien a été reporté à l’initiative de l’employeur, le point de départ du délai d’un mois demeure à compter de la date prévue pour l’entretien initialement fixé[13].

Face au peu de souplesse des juridictions sur le sujet, l’employeur qui envisage de solliciter ou d’accepter un report de l’entretien préalable doit donc systématiquement s’assurer qu’un tel report lui permette de respecter les délais légaux. Rappelons que si la méconnaissance des règles relatives à la procédure disciplinaire peut entraîner l’annulation de la sanction prononcée[14], tel n’est pas le cas du licenciement entaché d’une telle irrégularité qui est « seulement » sanctionné par une indemnité ne pouvant excéder un mois de salaire[15].

Le cas des CCN 51, 66 et des accords CHRS

En principe, la convocation du salarié à un entretien préalable n’est pas obligatoire lorsque la sanction envisagée – tel un avertissement ou un blâme – n’a pas d’incidence sur sa présence dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération. Par exception, les structures appliquant les conventions collectives du 31 octobre 1951, du 15 mars 1966 et les accords CHRS sont tenues de convoquer le salarié à un entretien préalable quelle que soit la sanction envisagée, puisque les licenciements pour faute simple doivent être précédés d’une ou deux sanctions selon la convention applicable, de sorte que toutes les sanctions sont susceptibles d’avoir des effets sur la présence du salarié dans la structure[17].

Cécile Noël


[1] Article L. 1332-4 du Code du travail

[2] Cass. soc., 26 octobre 2016, n° 14-26.918

[3] Cass. soc., 25 octobre 2007, n° 06-42.493

[4] Cass. soc., 6 avril 2016, n° 14-28.815

[5] Cass. soc, 17 janvier 2018, n° 16-18.172 ; CA Versailles, 4 novembre 2020, n° 18/02926

[6] Cass. soc., 26 octobre 2016, 14-26.918 ; CA Paris, 17 juin 2020, n° 18/05863

[7] CA Versailles, 31 janvier 2019, n° 17/01623

[8] Article L. 1232-2 du Code du travail

[9] Cass. soc. 24 novembre 2010, n° 09-66.616

[10] Cass. soc., 29 janvier 2014, n° 12-19.872

[11] Cass. soc., 31 mai 2000, n° 98-42.130

[13] Article L. 1332-2 du Code du travail

[14] Cass. soc., 27 novembre 2019, n° 18-15.195

[15] Article L. 1333-2 du Code du travail

[16] Article L. 1235-2 du Code du travail

[17] Cass. soc., 3 mai 2011, n° 10-14.104

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Présidence du CSE : qui est compétent ?

Publié dans le magazine Direction[s] n° 196 d’avril 2021.
Disponible en téléchargement PDF à la fin de l’article et consultable sur le site internet de Direction[s].

La désignation de la personne appelée à présider le comité social et économique (CSE) est loin d’être anodine. En effet, le bon fonctionnement de l’instance, ainsi que la régularité de ses réunions et consultations dépendent d’elle.

La question de la personne habilitée à présider le comité social et économique (CSE) présente de réels enjeux pour les associations. Enjeu pratique, puisqu’un dialogue social efficient implique que les élus aient un interlocuteur compétent pour mener les informations et les consultations de l’instance. Enjeu juridique, puisqu’une présidence assurée par une personne non compétente peut emporter l’annulation des consultations effectuées et être constitutive d’un délit d’entrave.

Principes applicables

La loi prévoit seulement que le CSE est présidé par l’employeur ou son représentant [1]. Dans les associations, le pouvoir de représentation de l’employeur découle des statuts. En règle générale, cette compétence est dévolue au président. En pratique, il est rare qu’il assure lui-même ce rôle qui est plus fréquemment dévolu à un dirigeant « de terrain », tel que le directeur général (pour le CSE ou le CSE central) ou un directeur (pour le CSE d’établissement).

Si le président du CSE n’est pas celui de l’association, il convient de formaliser une délégation de pouvoir dans le respect des dispositions statutaires. Dans tous les cas, ce représentant doit disposer de l’autorité, de la compétence et des moyens nécessaires pour assurer son rôle. Cela implique que le délégataire puisse engager l’association par ses déclarations, dispose du pouvoir de prendre des décisions de façon autonome, ainsi que de connaissances lui permettant d’informer les élus et de répondre à leurs interrogations.

Vers un assouplissement de la jurisprudence ?

Dans une récente affaire, un comité d’entreprise demandait l’annulation de réunions présidées par des salariés mis à disposition dans le cadre d’un prêt de main-d’œuvre à but non lucratif [2], avec octroi d’une délégation de pouvoir du président pour présider l’instance. La Cour de cassation rappelle que « l’employeur peut déléguer cette attribution qui lui incombe légalement, à la condition que la personne assurant la présidence par délégation ait la qualité et le pouvoir nécessaires à l’information et à la consultation de l’institution représentative du personnel (IRP), de nature à permettre l’exercice effectif des prérogatives de celle-ci ». Tout en précisant pour la première fois que « peu important que le délégataire soit mis à disposition de l’employeur par une autre entreprise »[3].

Dans le même sens, la cour d’appel de Versailles a récemment jugé que la loi n’impose pas que le président de la commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) soit nécessairement un salarié de l’entreprise, dès lors que la délégation est donnée à « une personne qui en raison de ses liens et missions n’est pas étrangère à l’entreprise et qui par ailleurs présente les compétences nécessaires pour être un interlocuteur utile des représentants du personnel » [4].

Faut-il en déduire que la jurisprudence entend élargir le schéma déjà admis d’une présidence du comité par des salariés d’un même groupe, à toute personne extérieure à l’association – comme un manager de transition prestataire –, dès lors que les critères de validité de la délégation de pouvoir sont remplis ?

Outre le fait que l’affaire soumise à la Cour de cassation, rendue en référé, concernait exclusivement une situation de prêt de personnel à but non lucratif, les deux entreprises ayant mis à disposition les salariés n’étaient pas étrangères à l’association concernée puisqu’ayant le même dirigeant et appartenant au même groupe. Dans l’attente de précisions, la prudence est donc de mise.

Anticipez tout empêchement

Le président du CSE est membre de droit de cette instance et sa présence aux réunions est obligatoire. Ce principe emporte plusieurs conséquences. Si le président est absent et qu’il ne se fait pas remplacer, le comité ne peut pas valablement siéger. S’il se soustrait à son obligation de présidence du CSE, il s’expose au délit d’entrave. S’il est défaillant, et à la demande d’au moins la moitié de ses membres, le CSE peut être convoqué par l’inspecteur du travail et siéger sous sa présidence (en général, l’inspecteur du travail se borne à rappeler l’employeur à l’ordre pour qu’il respecte ses obligations). Il est donc opportun de prévenir un empêchement du président, qu’il soit ponctuel ou de plus longue durée, afin d’assurer la continuité du fonctionnement de l’instance. Cette anticipation peut utilement résider dans la signature d’une délégation principale pour le président habituel du CSE d’une part, et d’une délégation subsidiaire pour la personne appelée à le suppléer d’autre part. Le cas échéant, il est recommandé de communiquer ces documents au CSE pour prévenir tout risque de contestation.

Cécile Noël
Juriste, Picard avocats

[1] Code du travail, article L2315-23
[2] Code du travail, article L8241-2
[3] Cass. soc., 25 novembre 2020, n° 19-18.681
[4] CA Versailles, 12 mars 2020, n° 19/02628

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L’ESSentiel – Mars 2021

Le 28ème numéro de l’ESSentiel, la newsletter en droit du travail pour les employeurs du secteur, est disponible !

Au menu de cette édition printanière, le régime des astreintes retoqué par le droit européen, la vigilance en matière de conclusion de CUI-CAE, le « plan d’action télétravail » prévu par le dernier protocole national sanitaire, la future prime PEPA, le durcissement de l’index égalité H/F, un décryptage des dernières jurisprudences et un focus sur le fractionnement des congés payés.

Bonne lecture !

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Arrêts de travail dérogatoires : décryptage des nouveautés

Compte tenu de l’évolution du contexte épidémique, le Ministère des Solidarités et de la Santé a annoncé l’extension du dispositif des arrêts de travail dérogatoires pour les salariés testés positifs au Covid-19 ou symptomatiques dans l’attente du résultat de leur test.

Ce nouveau « type » d’arrêt dérogatoire, formalisé par un décret n° 2021-13 du 8 janvier 2021 (J.O. du 9 janvier), permet ainsi au salarié de bénéficier des IJSS et du complément employeur (il s’agit bien ici du complément légal et non pas conventionnel) sans délai de carence ou de conditions d’ouverture du droit.

Ce nouveau dispositif vient ainsi s’ajouter à celui permettant au salarié identifié comme « cas contact » et faisant l’objet d’une mesure d’isolement de bénéficier des indemnités journalières de sécurité sociales (IJSS), et cela sans conditions d’ouverture des droits (minimum d’activité ou de cotisations), sans délai de carence et sans qu’elles soient prises en compte dans le calcul des durées maximales d’indemnisation, dès lors qu’il est dans l’impossibilité de travailler, y compris en télétravail. A noter que le dispositif d’activité partielle dérogatoire reste applicable pour les personnes vulnérables éligibles ainsi qu’aux parents contraints de garder leurs enfants.

Salariés concernés par le nouvel arrêt de travail dérogatoire

En premier lieu, le nouveau dispositif concerne les arrêts de travail débutant à compter du 10 janvier 2021. Il s’applique jusqu’au 31 mars 2021, cette date étant toutefois susceptible d’être prolongée en fonction de l’évolution de l’épidémie..

Ensuite, il ne s’applique qu’aux salariés se trouvant dans l’impossibilité de travailler et de télétravailler.

Enfin, le salarié doit se trouver dans l’une ou l’autre des deux situations suivantes :

  • présenter des symptômes de l’infection au covid-19 et avoir réalisé un test de détection au virus dans un délai de 2 jours à compter du début de l’arrêt de travail, et pour la durée courant jusqu’à la date d’obtention du résultat du test ;
  • présenter le résultat d’un test de détection du virus concluant à une contamination par la covid-19.

La durée maximale de l’indemnisation correspond à la durée de la mesure d’isolement, de mise en quarantaine, d’éviction et de maintien à domicile.

À noter que l’Assurance Maladie précise qu’elle « se réserve le droit de demander toutes informations complémentaires dans le cadre de la vérification des conditions d’indemnisation », parmi lesquelles figure le caractère « non télétravaillable » du poste de travail. Aussi, le salarié doit, avant de procéder à sa télédéclaration, certifier « ne pas pouvoir télétravailler et présenter des symptômes de la Covid-19 ».

Par ailleurs et surtout, l’Assurance Maladie indique : « Vous êtes salarié, soignant ou non-soignant, d’un établissement de santé ou d’un établissement médico-social ou d’un centre de l’Établissement Français du Sang : vous devez prendre contact avec votre employeur ou la médecine du travail de votre établissement pour solliciter leur accord avant l’établissement d’un arrêt de travail dérogatoire. (…) Les professionnels (…) de l’accompagnement social et médico-social à domicile (SAAD, SSIAD, SPASAD), peuvent dans certains cas faire l’objet d’une dérogation à l’isolement, au cas par cas, en fonction de la nature des symptômes et de la nécessité de maintenir l’offre de soins dans leur territoire. Ils doivent donc avant d’utiliser ce téléservice évaluer l’opportunité de maintenir l’activité (en lien avec leur employeur s’ils sont salariés), ainsi que les mesures renforcées à mettre en œuvre si l’activité doit être maintenue. »

Le site service-public précise quant à lui que « Vous ne pouvez pas utiliser ces téléservices si vous êtes salarié, soignant ou non-soignant, d’un établissement de santé ou d’un établissement médico-social. Dans ce cas, vous devez prendre contact avec votre employeur ou la médecine du travail de votre établissement. »

Or, si cette « restriction » d’application pour le personnel des ESSMS vise assez logiquement à assurer une continuité de l’activité et des soins, elle ne figure pas dans les dispositions légales et réglementaires… D’un point de vue strictement juridique, un salarié pourrait donc tenter de contester une telle mesure d’exclusion qui n’est pas prévue par la loi ou le règlement, le site internet de l’Assurance Maladie ou Service-Public.fr n’ayant aucune valeur juridique.

Néanmoins et de fait, la plateforme de télédéclaration est gérée par l’Assurance Maladie elle-même, laquelle est chargée de traiter les demandes et de verser les IJSS, et peut donc refuser un dossier non conforme.

Sur ce point, lorsque le salarié procède à la télédéclaration, il doit certifier « sur l’honneur l’exactitude de ma déclaration conformément aux Conditions Générales d’Utilisation du téléservice », ces conditions rappelant que « Il ne s’applique pas non plus aux soignants ou non-soignants salariés des établissements de santé, des établissements médico-sociaux ou des Etablissements Français du Sang dont la situation doit être évaluée au cas par cas en lien avec la médecine du travail de l’établissementAucun arrêt de travail relevant de ce dispositif dérogatoire ne peut ainsi être délivré à ces personnels, par le biais de ce téléservice(…) En cas de doute, l’utilisateur est invité à se rapprocher de son employeur avant d’effectuer une demande d’arrêt dérogatoire via ce téléservice. »

Cette formulation présente une certaine contradiction puisqu’à la lecture de la fiche diffusée par l’Assurance Maladie, un arrêt de travail relevant de ce dispositif dérogatoire pourrait bien être délivré… Sous réserve toutefois de l’accord de l’employeur ou du médecin du travail.

Pour éviter les difficultés, il est préconisé de communiquer auprès des salariés afin d’expliquer ce dispositif et la procédure à suivre (en particulier s’agissant recueil préalable de l’accord de l’employeur ou du médecin du travail), éventuellement après sollicitation préalable de l’ARS et/ou du médecin du travail afin de connaître leurs éventuelles recommandations.

Procédure d’auto-déclaration et fonctionnement du téléservice

Sous réserve de la particularité propre au secteur, impliquant l’accord préalable de l’employeur ou du médecin du travail, la procédure de télédéclaration est la suivante :

  • Le salarié se déclare sur le site declare.ameli.fr ;
  • Il reçoit alors un récépissé lui permettant de justifier son absence auprès de l’employeur ;
  • Il se reconnecte au téléservice une fois le test de dépistage RT-PCR ou antigénique réalisé dans le délai imparti, afin d’indiquer la date du test et le lieu de dépistage ;
  • Si le résultat du test est négatif, il peut reprendre son travail (ou consulter un médecin si ses symptômes persistent et ne permettent pas de travailler). Il reçoit pour cela un document de l’Assurance Maladie attestant des dates acceptées pour l’arrêt de travail, à remettre à l’employeur ;
  • Si le test est positif, l’arrêt de travail est alors prolongé.

L’Assurance Maladie détaille chaque étape dans une fiche pratique publiée le 15 janvier.

Attention, si le salarié présente des symptômes au Covid-19 et devant passer un test de dépistage se fait prescrire un arrêt de travail par son médecin, il sera indemnisé dans les conditions de droit commun (avec application de la carence notamment).

Non-respect de la procédure : quelles conséquences ?

Dans la mesure où le décret conditionne expressément le versement des indemnités journalières et du complément employeur à la réalisation du test dans le délai de deux jours (il s’agit bien du délai pour réaliser le test et non pour en obtenir le résultat), si le salarié ne respecte pas le délai imparti, son absence se situe en dehors de tout cadre légal puisqu’il ne bénéficie pas d’un arrêt de travail dérogatoire conforme. 

À noter d’ailleurs que le texte ne prévoit aucune dérogation, comme par exemple la difficulté à obtenir un rendez-vous pour réaliser le test. Néanmoins et à date, toute personne peut en principe, sans rendez-vous et en moins de deux jours, réaliser un test RT-PCR ou antigénique.

Bien que le texte ne précise pas les conséquences d’un tel retard, à défaut pour le salarié de présenter un arrêt de travail valable pour cette période :

  • l’employeur n’aurait pas à verser les indemnités complémentaires légales ;
  • l’absence pourrait être analysée comme étant injustifiée.

En pratique, le salarié pourra toujours solliciter un arrêt maladie « classique » auprès de son médecin-traitant ou du médecin du travail (voir décret n° 2021-24 du 13 janvier 2021 fixant les conditions temporaires de prescription et de renouvellement des arrêts de travail prescrits par le médecin du travail), mais pas pour la période comprise entre la date de la télédéclaration et la date de début de cet arrêt maladie.

En telle hypothèse, il pourrait par exemple être proposé au salarié de poser des congés pour les jours non indemnisés.

S’agissant du traitement disciplinaire d’une telle absence, il convient selon nous d’être pragmatique et d’analyser la situation au cas par cas. En l’absence d’abus manifeste par le salarié (par exemple, test réalisé avec un léger retard dûment justifié), une sanction pourrait apparaître « excessive » (et en tout état de cause inenvisageable si un congé est posé et accepté).

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Flash Info

Activité partielle pour personnes vulnérables : nouvelle actualisation des conditions d’éligibilité !

Nous l’évoquions dans notre flash info du 15 octobre dernier : à la suite de la suspension du décret n° 2020-1098 du 29 août 2020 par le Conseil d’État, le ministre des Solidarités et de la Santé avait annoncé que la liste des personnes vulnérables « était appelée à évoluer ».

C’est chose faite : le décret n° 2020-1365 du 10 novembre 2020, publié au J.O. du 11 novembre et entré en vigueur ce 12 novembre, actualise la liste des personnes considérées comme « vulnérables » pour le bénéfice de l’activité partielle dérogatoire.

En synthèse, la liste est identique à celle qui était initialement prévue par le décret n° 2020-521 du 5 mai 2020, avec l’ajout du critère de vulnérabilité suivant : « Être atteint d’une maladie du motoneurone, d’une myasthénie grave, de sclérose en plaques, de la maladie de Parkinson, de la paralysie cérébrale, de quadriplégie ou hémiplégie, d’une tumeur maligne primitive cérébrale, d’une maladie cérébelleuse progressive, ou d’une maladie rare. » Ainsi, après avoir supprimé plus de la moitié des critères de vulnérabilité, le gouvernement fait volte-face et procède même à une extension de la liste.

Dès le 28 octobre, l’Assurance Maladie avait actualisé son site internet pour tenir compte de l’ordonnance du Conseil d’État ayant procédé à la suspension du décret du 28 août, revenant à la liste initiale des critères de vulnérabilité.

Ainsi, il convient donc de distinguer deux périodes :

  • Du 1er mai 2020 au 11 novembre 2020 : application du décret n° 2020-521 du 5 mai 2020 ;
  • À partir du 12 novembre 2020 : application du décret n° 2020-473 du 10 novembre 2020.

Vous trouverez, en annexe, une synthèse téléchargeable relative aux critères applicables par périodes.

Par ailleurs, le nouveau décret vient préciser les conditions d’éligibilité de l’activité partielle dérogatoire, en indiquant qu’outre l’état de vulnérabilité conforme aux critères visés, le salarié ne doit pouvoir ni recourir totalement au télétravail, ni bénéficier des mesures de protection renforcées suivantes :

  • L’isolement du poste de travail, notamment par la mise à disposition d’un bureau individuel ou, à défaut, son aménagement, pour limiter au maximum le risque d’exposition, en particulier par l’adaptation des horaires ou la mise en place de protections matérielles ;
  • Le respect, sur le lieu de travail et en tout lieu fréquenté par la personne à l’occasion de son activité professionnelle, de gestes barrières renforcés : hygiène des mains renforcée, port systématique d’un masque de type chirurgical lorsque la distanciation physique ne peut être respectée ou en milieu clos, avec changement de ce masque au moins toutes les quatre heures et avant ce délai s’il est mouillé ou humide ;
  • L’absence ou la limitation du partage du poste de travail ;
  • Le nettoyage et la désinfection du poste de travail et des surfaces touchées par la personne au moins en début et en fin de poste, en particulier lorsque ce poste est partagé ;
  • Une adaptation des horaires d’arrivée et de départ et des éventuels autres déplacements professionnels, compte tenu des moyens de transport utilisés par la personne, afin d’y éviter les heures d’affluence ;
  • La mise à disposition par l’employeur de masques de type chirurgical en nombre suffisant pour couvrir les trajets entre le domicile et le lieu de travail lorsque la personne recourt à des moyens de transport collectifs.

En réalité, ces précisions nouvelles découlent de l’article 20 de la n° 2020-473 du 25 avril 2020, sur lequel sont fondés les décrets successifs relatifs aux personnes vulnérables, qui précise que « sont placés en position d’activité partielle les salariés de droit privé se trouvant dans l’impossibilité de continuer à travailler ». L’idée est que l’activité partielle dérogatoire doit s’appliquer en dernier recours.

Le gouvernement définit donc ce que l’on doit entendre par une telle « impossibilité ».

Au demeurant, ce critère de « non bénéfice des mesures de protection renforcée » laisse dubitatif, en particulier s’agissant des mesures relatives à « la mise à disposition par l’employeur de masques de type chirurgical en nombre suffisant pour couvrir les trajets entre le domicile et le lieu de travail lorsque la personne recourt à des moyens de transport collectifs » ou « le respect, sur le lieu de travail et en tout lieu fréquenté par la personne à l’occasion de son activité professionnelle, de gestes barrières renforcés ».

En effet, comment justifier une telle impossibilité dès lors que tout employeur peut – et doit, au titre de son obligation de sécurité – faire appliquer les gestes barrières pour le travail en présentiel et fournir des masques aux salariés (certes, pas nécessairement pour les trajets domicile – travail même si cela ne peut qu’être recommandé) ?

Par ailleurs, dès lors que les conditions de travail de l’intéressé ne répondent pas aux mesures de protection renforcées précités, le décret indique que le placement en position d’activité partielle est effectué à la demande du salarié et sur présentation à l’employeur d’un certificat établi par un médecin. Le décret précise que ce certificat peut être celui déjà délivré au salarié en application du décret du 5 mai 2020 : le salarié n’a donc pas l’obligation de justifier d’un nouveau certificat médical.

Enfin, lorsque le salarié est en désaccord avec l’employeur sur l’appréciation portée par celui-ci sur la mise en œuvre des mesures de protection renforcées, il saisit le médecin du travail qui se prononce en recourant, le cas échéant, à l’équipe pluridisciplinaire de santé au travail. Le salarié est alors placé en position d’activité partielle par l’employeur, dans l’attente de l’avis du médecin du travail.

Si jusqu’alors, la décision de placer le salarié en activité partielle reposait sur les seules épaules de l’employeur, le médecin du travail devient désormais l’organe compétent pour « trancher » l’éligibilité du salarié au dispositif compte tenu des mesures mises en œuvre dans l’entreprise.

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#5 : Vérifiez votre règlement intérieur

Cinquième volet de notre série « check-list des obligations sociales avant le 31 décembre » : la vérification de votre règlement intérieur !

Obligatoire dans les entreprises d’au moins 50 salariés depuis la réforme des seuils d’effectifs (contre 20 salariés auparavant), le règlement intérieur (RI) est un document essentiel pour déterminer les droits et obligations au sein d’une structure. Attention, les structures de moins de 50 salariés dotées d’un RI doivent respecter toutes les règles légales de fond et de procédure en la matière[1].

Contenu obligatoire

Parfois négligé en pratique, le contenu du RI doit satisfaire aux prescriptions minimales prévues par le Code du travail mais peut également constituer un outil de gestion des ressources humaines primordial en matière de santé, de sécurité et de discipline.

Le RI doit ainsi contenir[2]:

  • les mesures d’application de la réglementation en matière de santé et de sécurité dans l’entreprise ou l’établissement, notamment les instructions prévues à l’article L. 4122-1 du Code du travail. Ces instructions précisent, en particulier lorsque la nature des risques le justifie, les conditions d’utilisation des équipements de travail, des moyens de protection, des substances et préparations dangereuses. Elles doivent être adaptées à la nature des tâches à accomplir ;
  • les conditions dans lesquelles les salariés peuvent être appelés à participer, à la demande de l’employeur, au rétablissement de conditions de travail protectrices de la santé et de la sécurité des salariés, dès lors qu’elles apparaîtraient compromises ;
  • les règles générales et permanentes relatives à la discipline, notamment la nature et l’échelle des sanctions que peut prendre l’employeur.

A cet égard, le RI doit rappeler[3] :

  • les dispositions relatives aux droits de la défense des salariés définis aux articles L. 1332-1 à L. 1332-3 du Code du travail et/ou par la convention collective applicable (par exemple, les CCN du 31 octobre 1951 et du 15 mars 1966 prévoient des dispositions plus favorables) ;
  • les dispositions relatives aux harcèlements moral et sexuel ainsi qu’aux agissements sexistes prévues par le Code du travail. L’oubli de cette dernière mention est légion au sein des règlements intérieurs.

Toilettage du règlement intérieur : modalités pratiques

Toute modification du règlement intérieur implique de suivre la même procédure que pour son élaboration : consultation du CSE, précision de la date d’application, communication à l’inspecteur du travail, dépôt au conseil de prud’hommes et affichage.

Attention, les notes de service ou tout autre document (telle une charte) qui portent des prescriptions générales et permanentes dans les matières qui relèvent du RI sont considérées comme des adjonctions à celui-ci. Ils sont donc soumis aux mêmes règles de mise en place et de modification que le RI.

En pratique, le règlement intérieur doit être réécrit au fil des évolutions légales (par exemple, la création de la notion d’ « agissements sexistes » par la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018) mais également conventionnelles. A titre d’exemple, bon nombre de règlement intérieurs d’associations appliquant la CCN du 31 octobre 1951 continuent à indiquer que « sauf en cas de faute grave, il ne pourra y avoir de mesure de licenciement à l’égard d’un salarié, si ce dernier n’a pas fait l’objet précédemment d’au moins deux sanctions ». Or, depuis l’entrée en vigueur de l’avenant n° 2014-01 du 4 février 2014, une seule sanction préalable est exigée. Dans ce cas de figure, c’est le règlement intérieur, plus favorable, qui trouve alors à s’appliquer. En revanche, le RI ne peut jamais déroger à la convention collective dans un sens moins favorable : à défaut d’actualisation, la clause du RI moins favorable sera réputée non écrite.

La crise sanitaire exige-t-elle une mise à jour du règlement intérieur ?

La crise sanitaire conduit à s’interroger sur la rédaction actuelle des clauses du règlement intérieur, notamment en matière de port des équipements de protection.

Nombreux sont en effet les employeurs à se questionner sur la nécessité de le mettre à jour afin d’y intégrer les mesures de prévention liées à l’épidémie de Covid-19, comme le port du masque obligatoire.

En effet, si le protocole sanitaire impose le port du masque, cette « obligation » ne repose sur aucune base légale. Un salarié pourrait donc arguer du fait que la méconnaissance de ce protocole ne saurait entraîner une sanction disciplinaire. En réalité, la sanction disciplinaire du salarié récalcitrant pourrait juridiquement avoir deux fondements : soit la méconnaissance du RI (s’il a été actualisé à ce sujet ou si une note de service a été formalisée), soit l’insubordination du salarié qui ne respecte pas les directives sanitaires formulées par sa direction.

Par ailleurs, dès lors qu’il serait prévu dans le RI que les salariés doivent porter les équipements de protection individuelle (EPI) mis à leur disposition dans l’objectif d’une préservation de leur santé et leur sécurité, il serait alors suffisant de prendre une note de service pour préciser que le masque constitue un tel EPI. Or et comme évoqué, une note de service relevant du champ du RI doit suivre la procédure de modification de celui-ci.

En pratique, cette procédure peut poser difficulté dans un contexte sanitaire qui nécessite une certaine réactivité. En effet, le principe est que la note de service ou la modification du RI ne peut entrer en vigueur moins d’un mois après les formalités de dépôt… Toutefois, la loi pose l’exception de l’urgence – ce qui est susceptible d’être actuellement le cas, selon la modification en cause – et sous réserve que ces prescriptions nouvelles soient immédiatement communiquées au secrétaire du CSE et à l’inspecteur du travail.

Il y a toutefois une incertitude sur l’obligation de respecter cette procédure pour les mesures sanitaires actuelles puisqu’en théorie, elles n’ont pas vocation à être « permanentes ». Néanmoins et afin d’éviter toute difficulté dans l’hypothèse où un salarié serait sanctionné pour méconnaissance des règles sanitaires mises en place, il est préconisé de les formaliser via une note de service suivant la « procédure d’urgence » précitée.

En conclusion, si aucune « deadline » au 31 décembre 2020 n’est prévue par les textes concernant le règlement intérieur, il ne peut qu’être recommandé aux employeurs d’opérer ce travail de vérification pour assurer la meilleure application des mesures de protection pour la santé et la sécurité, surtout en cette période particulière. Cela participe d’ailleurs, pour l’employeur, au respect de son obligation de sécurité. Ainsi, la crise sanitaire pourrait être l’occasion d’opérer un toilettage en profondeur du règlement intérieur !


[1] Circulaire DRT n° 5-83 du 15 mars 1983
[2] Article L. 1321-1 du Code du travail
[3] Article L. 1321-2 du Code du travail

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L’ESSentiel – Juillet & Août 2020

Le 22ème numéro de l’ESSentiel, la newsletter en droit du travail pour les acteurs du secteur, est disponible !

Au menu de cette édition estivale à lire sur la plage comme au bureau, la prime Covid pour les salariés multi-employeurs, le sort de l’activité partielle dérogatoire, les principales mesures du troisième projet de loi de finances, un décryptage des dernières jurisprudences et un focus sur le renouvellement et la succession de salariés avec un même salarié.

Bonne lecture,

L’équipe Picard avocats

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L’ESSentiel – Juin 2020

L’ESSentiel se déconfine avec la sortie de son 21ème numéro !

Au menu de cette nouvelle édition : la prime Covid à l’épreuve de l’égalité de traitement, les nouveautés en matière d’activité partielle, de CDD et de prêt de personnel à but non lucratif, une sélection des dernières jurisprudences et un focus sur le télétravail à l’heure du déconfinement.

Bonne lecture !

L’équipe Picard avocats

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La gestion des heures des commissions du CSE

Article publié dans le magazine Direction[s] n° 187 de juin 2020

La réglementation relative aux heures passées en commissions du comité social et économique (CSE) suscite bien des interrogations. En effet, le législateur donnant davantage de place à la négociation collective, les dispositions juridiques ne règlent que partiellement le régime applicable en la matière.

Le principe de la gestion des heures consacrées aux commissions est posé par l’article L2315-11 du Code du travail : le temps passé par les membres de la délégation du personnel du comité social et économique (CSE) aux réunions de celui-ci et de ses commissions est rémunéré comme du temps de travail effectif et n’est pas déduit des heures de délégation, dans la limite

d’une durée globale fixée par accord d’entreprise ou à défaut par décret en Conseil d’État. Cette limite annuelle est fixée à [1] : 

– 30 heures pour les entreprises de 300 à 1 000 salariés ; 

– 60 heures pour les entreprises de plus de 1 000 salariés.

Ce même décret prévoit que le temps consacré à la réunion de la commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) est également payé comme du temps de travail, non déduit des heures de délégation pour les membres titulaires du CSE.

Les commissions encadrées par ce crédit d’heures 

Une première incertitude était relevée à la lecture de l’article L2315-11 du Code du travail, qui semblait inclure dans le calcul de la durée annuelle globale des heures de délégation le temps passé aux réunions du CSE, de la commission économique et des « autres commissions », à savoir celles dédiées à la formation, l’information et l’aide au logement, à l’égalité professionnelle ou toute autre commission conventionnelle. Le ministère du Travail a apporté des premiers éclaircissements. D’une part, le temps passé en réunion du CSE n’est jamais déduit des heures de délégation [2] ; d’autre part, la limite des 30 ou 60 heures ne s’applique que pour les réunions des autres commissions, excluant ainsi celles du CSE et de la CSSCT [3]. 

Le quota ne s’applique pas aux réunions présidées par l’employeur, contrairement à celles présidées par un membre du CSE.

Une distinction semble donc être opérée entre les réunions présidées par l’employeur (CSE et CSSCT), qui ne se voient pas appliquer le quota fixé par décret, et les autres présidées par un membre du CSE. Ce raisonnement conduirait à considérer que le temps passé aux réunions de la commission économique présidées par l’employeur [4] inciterait ce dernier à tenter de faire passer, lors des négociations sur l’accord de fonctionnement du CSE, la présidence des commissions prévues conventionnellement systématiquement par un élu. Une précision sur ce point serait néanmoins la bienvenue. En effet, l’enjeu est important puisqu’au-delà des limites posées par le Code du travail [5], le temps passé par les membres de la délégation du personnel au CSE en réunion des autres commissions est déduit de leurs heures de délégation.

Quid des membres des autres commissions n’appartenant pas à la délégation du personnel ?

Pour mémoire, les membres de ces commissions peuvent être choisis parmi des salariés de l’entreprise

n’appartenant pas au CSE [6] et ne disposant ainsi pas d’heures de délégation. Ces salariés, et à défaut de dispositions plus favorables, pourraient être contraints de solliciter une autorisation d’absence auprès de leur responsable pour participer aux réunions des autres commissions. Dans ces conditions, un accord d’entreprise aurait tout intérêt à prévoir des moyens spécifiques pour ces membres non élus. 

Qu’en est-il du CSE central ?

Il demeure également une incertitude lorsque ces « autres commissions » sont instituées au niveau du CSE central (CSEC). Sauf accord d’entreprise, le temps passé aux réunions par les membres élus du CSEC ne devrait a priori pas être imputé de leur crédit d’heures, dans la limite du quota fixé par l’article R2315-7 du Code du travail. Pour le surplus, et faute d’heures de délégation légalement attachées au mandat de membre du CSEC, le temps passé à ces réunions serait alors déduit des heures de délégation dont ils bénéficient en tant qu’élus au CSE d’établissement.

Selon le ministère du Travail [7], concernant les représentants syndicaux, lorsqu’ils sont désignés pour être membres des autres commissions, le temps dédié aux réunions des commissions du CSE n’est pas rémunéré comme du temps de travail effectif et pourra être pris sur les heures de délégation.  La négociation d’un accord collectif d’entreprise traitant notamment du fonctionnement des commissions du CSE est donc vivement encouragée.

Marion Soler, avocate,

Cabinet Picard avocats

[1] Code du travail, article R2315-7

[2] Questions-réponses sur le CSE

n° 73, Le comité social et économique en 117 questions-réponses, version de janvier 2020, à télécharger sur

https://travail-emploi.gouv.fr

[3] Questions-réponses sur le CSE n° 81

[4] Code du travail, article L2315-47

[5] Code du travail, article R2315-7

[6] Code du travail, article R2315-28

[7] Questions-réponses sur le CSE

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Flash Info

Prime exceptionnelle de pouvoir d’achat : actualisation de l’instruction interministérielle

Note aux lecteurs : cet article est à jour au 5 mai 2020, date de sa publication.

La tant attendue instruction interministérielle n° DSS/5B/2020/59 du 16 avril 2020 relative à la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, portant mise à jour du « questions-réponses » annexé à l’instruction du 15 janvier 2020, vient d’être diffusée ce jour sur le site de la sécurité sociale !

En synthèse, la nouvelle instruction reprend les précisions qui avaient été apportées le 17 avril 2020 sur le site internet du Ministère du Travail. Vous trouverez, ci-après, l’analyse des principales modifications opérées par rapport à l’instruction du 15 janvier 2020.

Les conditions de travail liées au Covid-19 : critère de modulation et/ou d’exclusion ?

Dès les premières lignes, l’instruction précise qu’ « afin de prendre en compte plus particulièrement les salariés ayant permis le maintien de l’activité pendant l’épidémie de Covid-19, l’ordonnance prévoit un nouveau critère possible de modulation du montant de la prime permettant de tenir compte des conditions de travail liées à l’épidémie. »

À ce stade, la lettre de l’instruction est donc parfaitement conforme aux termes de l’ordonnance n° 2020- 385 du 1er avril 2020. Néanmoins, au sein du « questions-réponses » annexé, l’instruction reprend dans des termes strictement identiques les précisions apportées par le Ministère du travail le 17 avril :

« 1.5 La prime peut-elle être versée à une partie seulement des salariés ? OUI,

– Soit par l’exclusion d’une partie des salariés dont la rémunération est supérieure à un plafond. (…)
– Soit à raison des conditions de travail liées à l’épidémie de Covid-19 (cf. points 2.3 à 2.6 et 2.11)
(…) 2.6 Une entreprise peut-elle exclure du versement des salariés qui n’étaient pas présents pendant la période d’urgence sanitaire ?
OUI. L’objectif du nouveau cas de modulation prévu par l’ordonnance 202-385 est de permettre de récompenser la possibilité de prendre en compte la présence effective du salarié, en excluant, par exemple, les salariés en télétravail.
(…) 2.11 La modulation en fonction des conditions de travail pendant la période d’urgence sanitaire peut-elle aboutir, pour certains salariés, à une prime exceptionnelle égale à zéro ?
OUI. La modulation du montant de la prime, en fonction des conditions de travail pendant la période d’urgence sanitaire, peut permettre le versement d’un montant compris entre 0 et 1000 euros, seuil porté à 2000 € en cas de mise en oeuvre d’un accord d’intéressement. »

Or et comme nous l’évoquions dans notre flash info du 18 avril, l’article 7 de la LFSS pour 2020 précise que la prime « peut être attribuée par l’employeur à l’ensemble des salariés et des agents qu’il emploie ou à ceux dont la rémunération est inférieure à un plafond » (I-C).

À la stricte lecture de la loi, le seul critère permettant d’exclure des salariés du bénéfice de la prime est donc celui du plafond de rémunération. Dans le même sens, au sein des dispositions légales, le critère des conditions de travail liées au Covid-19 figure seulement parmi les critères de modulation du montant de la prime, au même titre que le niveau de classification ou la durée de présence effective pendant l’année écoulée par exemple (II 2°).

Ainsi, l’instruction confirme l’interprétation particulièrement extensive du Ministère. Or, rappelons que cette interprétation est inopposable en cas de contentieux, ce que ne manque pas de rappeler l’instruction elle-même : « Interprétation à retenir, sous réserve de l’appréciation souveraine du juge (…) ».

D’ailleurs, très récemment, la Cour de cassation a rappelé qu’une « convention collective, si elle manque de clarté, doit être interprétée comme la loi, c’est à dire d’abord en respectant la lettre du texte, ensuite en tenant compte d’un éventuel texte législatif ayant le même objet et, en dernier recours, en utilisant la méthode téléologique consistant à rechercher l’objectif social du texte»[1].

Si « l’objectif social » de l’ordonnance du 1er avril était effectivement de permettre aux employeurs de récompenser les salariés ayant maintenu une activité durant le contexte épidémique, la lettre du texte fait preuve de bien moins de souplesse.

Selon nous, il convient donc de rester vigilants face à une telle interprétation. En effet, en cas de litige, des salariés ayant été exclus du bénéfice de la prime pourraient être susceptibles de solliciter, par voie contentieuse, le versement de celle-ci. À notre sens, il demeure préconisé, quels que soient les critères de modulation retenus, de prévoir un montant « plancher » de versement de la PEPA, même relativement faible.

En revanche, lorsqu’une PEPA a déjà été versée avant le 1er avril, il serait possible, comme l’indique l’instruction (5.4), de procéder à un second versement sur le fondement des conditions de travail liées au Covid-19, en excluant les salariés non concernés par celui-ci.

En effet, en telle hypothèse, il ne s’agit que d’une prime unique versée en deux échéances. Tous les salariés éligibles ayant d’ores et déjà bénéficié d’un premier versement, ils ne sont pas exclus purement et simplement du dispositif, quand bien même le second versement ne ferait qu’application du critère de modulation « Covid ».

Le cadre temporel du critère « Covid »

L’instruction (2.5) précise que « La prime peut être modulée pour l’ensemble des salariés ayant continué leur activité durant la période d’urgence sanitaire (qui a débuté le 12 mars 2020) (…) ».

Or, l’état d’urgence sanitaire n’a pas débuté le jeudi 12 mars (qui correspond en réalité à la date fixée pour la période dite « protégée », notamment pour les délais de procédure) mais le mardi 24 mars[2], et cela jusqu’au 24 mai 2020[3]. D’ailleurs, le confinement n’a débuté que le 17 mars. Au 12 mars, il est donc discutable de considérer que les conditions de travail des salariés étaient impactées par le Covid-19.

Il est donc préconisé, pour l’appréciation du critère « Covid » :

  • soit de retenir une date de début au 24 mars, en se référant expressément à la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 ;
  • soit de retenir la date du 12 mars, en se référant aux précisions données par l’instruction interministérielle n° DSS/5B/2020/59 du 16 avril 2020.
Les congés liés à la parentalité

L’instruction précise (2.4) que pour le seul critère afférent aux conditions de travail liées à l’épidémie de Covid-19, les salariés absents pour des congés liés à la parentalité peuvent être exclus de la prime :

« (…) pour que la prime soit éligible à l’exonération, il n’est pas autorisé d’en réduire le montant à raison des (…) congés au titre de la maternité, de la paternité et de l’accueil ou de l’adoption d’un enfant, ainsi que des congés d’éducation parentale, de présence parentale. La prime des salariés absents du fait de l’un de ces congés ne peut être réduite à raison de cette absence, sauf dans les cas où la prime est modulée en application des points 2.5, 2.6 et 2.11. »

Néanmoins, les dispositions légales telles que modifiées par l’ordonnance du 1er avril continuent de préciser :

« 2° Son montant peut être modulé selon les bénéficiaires en fonction de la rémunération, du niveau de classification, des conditions de travail liées à l’épidémie de covid-19, de la durée de présence effective pendant l’année écoulée ou la durée de travail prévue au contrat de travail mentionnée à la dernière phrase du deuxième alinéa du III de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale. Les congés prévus au chapitre V du titre II du livre II de la première partie du code du travail sont assimilés à des périodes de présence effective »

Or, l’instruction évoque elle-même, s’agissant du critère « Covid », la notion de « présence effective » :

« L’objectif du nouveau cas de modulation prévu par l’ordonnance 202-385 est de permettre de récompenser la possibilité de [coquille] prendre en compte la présence effective du salarié, en excluant, par exemple, les salariés en télétravail. »

Là encore, il sera rappelé que la lettre des dispositions légales prime tant sur la volonté de ses rédacteurs que sur l’interprétation qui en est faite par l’Administration.

Néanmoins, des arguments pourraient tout de même défendre la possibilité d’exclure les salariés en congé lié à la parentalité du « critère Covid » :

  • Le texte indique que les congés liés à la parentalité « sont assimilés à des périodes de présence effective » pour le bénéfice de la prime. Or :
  • le critère de conditions de travail liées à l’épidémie de covid-19, telle que rédigé dans la loi, ne se réfère pas réellement à une condition de présence effective (sinon, le législateur aurait pu préciser une présence effective « durant l’épidémie de covid-19 »), mais vise seulement des conditions de travail particulières ;
  • les salariés absents, quand bien même leur absence serait assimilée à du temps de présence effective, n’ont par définition pas pu voir leurs conditions de travail impactées par l’épidémie, contrairement aux salariés en télétravail ou présents sur le terrain ;
  • Les salariés absents ne sauraient invoquer une quelconque discrimination dès lors que toutes les absences sont traitées de la même manière[4].

Ainsi, le risque principal serait non celui – mesuré – de la discrimination mais davantage celui d’un rappel de prime sollicité par les salariés en congés liés à la parentalité, suivant les termes de l’article 7 de la LFSS. Là encore, le fait d’allouer un montant « plancher » à tous les salariés, même faible, permettrait d’amoindrir les risques contentieux.

Si une PEPA a déjà été versée et qu’un complément est envisagé, peut-on subordonner le versement d’un complément de prime à une « rallonge » des financeurs ?

Selon nous, rien ne s’oppose à ce qu’il soit précisé, dans l’avenant à l’accord collectif ou dans la DUE instituant le complément de prime, que son versement soit subordonné à l’acceptation expresse de l’autorité de tutelle d’une prise en charge budgétaire supplémentaire.

En tel cas, l’acte est conclu sous condition suspensive d’un accord exprès des financeurs. À défaut d’avoir obtenu un tel aval écrit dans un délai fixé par l’avenant ou la DUE, ce dernier ou cette dernière serait caduc.

À noter : l’instruction indique que « Les entreprises ayant déjà versé une prime exceptionnelle sur la base de l’article 7 de la LFSS pour 2020 pourront compléter leur versement initial par un avenant à la convention ou à la DUE. » À notre sens, il s’agirait d’une seconde DUE « complémentaire » à la première et non d’un avenant à celle-ci. En effet, la jurisprudence se montre réfractaire, en dehors de toute dénonciation régulière, à la possibilité de modifier une décision unilatérale, quelle qu’elle soit.

Enfin, l’instruction rappelle une distinction qu’il convient d’opérer :

  • Si une PEPA a déjà été versée sur la base de l’article 7 de la LFSS pour 2020 dans sa version antérieure au 1er avril 2020, la structure pourra envisager un versement complémentaire sur le seul fondement du critère des conditions de travail liées à l’épidémie de Covid-19 ;
  • Si l’accord ou la DUE instituant la PEPA est conclu à partir du 1er avril 2020, il est possible de prévoir plusieurs échéances de versement mais les critères d’attribution doivent être strictement identiques pour chacune des échéances.
Question fréquente : quelle valeur juridique pour cette instruction interministérielle ?

S’il convient d’adopter la plus grande prudence vis-à-vis des précisons diffusées sur les sites internet ministériels ou de l’URSSAF, l’instruction du 15 janvier 2020 a été publiée le 16 mars parmi la liste des documents opposables sur le site du Ministère des Solidarités et de la Santé ainsi qu’au bulletin officiel de ce même Ministère. Cela rendait le texte opposable à l’Administration en cas de contrôle, même en l’absence de « double publication » sur le site « circulaires.legifrance.gouv.fr »[5].

À ce jour, l’instruction n° DSS/5B/2020/59 du 16 avril 2020 n’a été publiée que sur le site internet de la sécurité sociale, qui est inopposable à l’Administration en cas de contrôle. Néanmoins, la publication « officielle » de l’instruction du 15 janvier a pris du temps (2 mois). Il devrait donc en être de même pour celle du 16 avril, dont la publication est attendue afin de sécuriser, au moins vis-à-vis de l’URSSAF, les interprétations administratives. [Mise à jour : l’instruction a été publiée sur le site du Ministère des Solidarités et de la Santé le 15 mai 2020]

[1] Cass. soc., 25 mars 2020, n° 18-12.467
[2] Loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19
[3] Cette date devrait être prorogée au 24 juillet 2020, selon le projet de loi actuellement soumis au Parlement
[4] Par exemple : Cass. soc., 17 octobre 2007, n° 06-40.311
[5] CRPA, art. L.312-3 et D.312-11

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Les réunions du CSE pendant la période de confinement

Note aux lecteurs : cet article est à jour au 20 mars 2020, date de sa publication.

1. En cas de fermeture temporaire de l’établissement, la tenue des réunions du CSE est-elle suspendue ?

Le Code du travail ne prévoit aucune circonstance emportant, pour l’employeur, une suspension de ses obligations envers le CSE.

Dans l’attente du contenu des ordonnances (dont la publication est prévue pour le début de la semaine prochaine), la « vie du CSE » suit donc son cours et, notamment, la tenue des réunions périodiques de l’instance.

Pour mémoire, s’agissant du nombre de réunions du CSE :

  • dans les structures de moins de 50 salariés, les membres du CSE sont réunis au moins une fois par mois ;
  • dans celles de 50 salariés et plus, le nombre de réunions peut être fixé par accord d’entreprise majoritaire (minimum 6 dont 4 portant sur les questions de santé, de sécurité et de conditions de travail). À défaut, ce nombre est fixé à une par mois minimum dans les structures d’au moins 300 salariés et une tous les deux mois dans celles de moins de 300 salariés.

En présence d’un accord collectif fixant la périodicité des réunions ordinaires, il pourrait être envisageable de conclure avec les délégués syndicaux un avenant de révision temporaire venant modifier cette périodicité pour l’adapter aux circonstances (par exemple, en prévoyant davantage de réunions périodiques pour le second semestre).

A défaut d’accord collectif, il serait envisageable que l’employeur s’accorde à ce sujet avec les membres du CSE. Rien n’est prévu à ce sujet par les textes… Mais à circonstances exceptionnelles, mesures exceptionnelles !

2. Dois-je convoquer un salarié placé en activité partielle ? Un salarié en arrêt maladie, notamment en cas d’impossibilité de trouver un mode de garde pour ses enfants ?

Le placement du salarié en activité partielle (pendant les périodes où il n’est pas en activité), tout comme l’arrêt maladie, emporte suspension de son contrat de travail.

Toutefois, comme toute suspension du contrat de travail, l’activité partielle et l’arrêt maladie n’ont aucune incidence sur l’exercice du mandat du représentant du personnel ou syndical qui n’est pas suspendu.

Il convient donc d’inviter les salariés concernés aux réunions du CSE, sans qu’il ne soit nécessaire de mettre en œuvre les règles de suppléance (sauf bien sûr à ce que le salarié soit effectivement absent/indisponible lors de la réunion).

3. Comment réunir le CSE en préservant la santé des représentants du personnel ?

Selon la circulaire « questions-réponses » du Ministère du Travail relative au Covid-19 (mise à jour au 17 mars 2020), « Le recours à la visioconférence est encouragé si nécessaire pour éviter les contacts physiques ».

En principe, le recours à la visioconférence pour réunir le CSE peut être autorisé par accord entre l’employeur et les membres élus de la délégation du personnel au CSE (C. trav., art. L. 2315-4).

En l’absence d’accord, l’employeur peut réunir le CSE par visioconférence trois fois par année civile.

Le dispositif technique doit garantir l’identification des membres du comité et leur participation effective, en assurant la retransmission continue et simultanée du son et de l’image des délibérations.

Les articles D. 2315-1 et D. 2315-2 du Code du travail déterminent les conditions dans lesquelles le CSE peut, dans ce cadre, procéder à un vote à bulletin secret.

Si habituellement, la structure n’utilise pas un tel dispositif, de nombreuses solutions en ligne existent (Skype, Microsoft Teams, Hangout Meet, Jitsy…).

Naturellement, afin de recourir à un tel dispositif, il conviendra de s’assurer que chaque élu dispose des moyens de télécommunication nécessaires pour participer à la réunion en visioconférence.

Même si une telle obligation n’est pas prévue par les textes, il est préconisé d’informer l’inspecteur du travail, l’agent des services de prévention de la sécurité sociale, le médecin du travail et le responsable interne du service de sécurité et des conditions de travail de la décision de tenir les réunions par visioconférence (puisque ces personnes sont amenées à être conviées aux réunions).

Enfin, il convient de ne pas oublier de respecter les règles habituelles de convocation du comité (laquelle devra notamment mentionner les modalités de connexion à la plateforme de visioconférence), d’élaboration conjointe de l’ordre du jour avec le secrétaire et sa transmission aux membres au moins 3 jours avant la date de la réunion.

En tout état de cause, il reste également possible de réunir le CSE en présentiel au sein de la structure, en particulier lorsque les élus ne sont pas placés en télétravail ou en activité partiel.

En telle hypothèse, il conviendra de veiller à respecter tous les gestes « barrières », notamment :

  • saluer les personnes présentes à la réunion  sans leur serrer la main ;
  • laisser une distance d’au moins un mètre en chaque personne présente ;
  • ne pas échanger de documents papiers lors de celle-ci.

Aussi, il pourrait tout à fait être envisagé de combiner la visioconférence et la réunion en présentiel, par exemple si des élus sont présents dans l’établissement lors de la réunion pendant que d’autres sont à leur domicile.

La direction assurerait la retransmission de la visioconférence au sein de la salle de réunion avec les élus présents, et les élus présents à leur domicile se connecteraient au dispositif de visioconférence.

Il est enfin à noter que seule la visioconférence est prévue par les textes et non la conférence téléphonique

Néanmoins, compte tenu des circonstances pour le moins exceptionnelles et si tel est le souhait des représentants du personnel, il pourrait être envisageable de s’accorder – par délibération et avec l’accord du président – sur la tenue de réunions téléphoniques afin de faciliter le bon fonctionnement de l’instance.

4. Pendant ces circonstances exceptionnelles, à quelles mesures doit-être associé le CSE ?

La gestion de l’épidémie de Covid-19 relève des attributions du CSE à plusieurs égards.

En premier lieu, le CSE a pour mission de promouvoir la santé, la sécurité et l’amélioration des conditions de travail dans son périmètre.

À ce titre :

  • Le comité peut être réuni à la demande motivée de deux de ses membres, sur des sujets relevant de la santé, de la sécurité ou des conditions de travail ;
  • Chaque membre dispose également d’un droit d’alerte en cas de « danger grave et imminent » (cela pourrait par exemple être le cas en présence d’un salarié qui travaille alors qu’il présente les symptômes du Coronavirus) ;
  • Le comité peut procéder à des inspections en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail (par exemple, sur le respect des mesures « barrières » dans l’établissement et la mise à disposition de matériel de prévention) ;
  • Plus généralement, le comité formule, à son initiative, et examine, à la demande de l’employeur, toute proposition de nature à améliorer les conditions de travail des salariés.

En particulier, en cette période de crise sanitaire, le CSE devra impérativement être associé à la démarche d’évaluation/actualisation des risques et consulté sur la mise à jour du document unique d’évaluation des risques (DUER).

Le Gouvernement attire en effet l’attention des employeurs sur la nécessité de procéder à l’évaluation des risques en tenant compte des modalités de contamination du Covid-19, particulièrement de la notion de « contact étroit », et d’actualiser le document unique d’évaluation des risques en associant le CSE et le service de santé au travail.

Le DUER devra identifier les situations de travail réunissant les critères suivants : même lieu de vie, contact direct à moins d’un mètre lors d’une toux, d’un éternuement ou d’une discussion de plus de 15 minutes en l’absence de mesures de protection, le risque étant multiplié en cas de contact des mains non lavées.

Il est absolument nécessaire de procéder à cette évaluation et cette actualisation afin de remplir l’obligation de prévention des risques professionnels incombant à l’employeur, au titre de son obligation de sécurité.

En second lieu, dans les structures de 50 salariés et plus, le CSE est informé et consulté sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise, notamment sur la durée du travail ou les conditions d’emploi, de travail et de formation professionnelle ainsi que sur tout aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail. 

C’est à ce titre que le CSE doit, par exemple, être informé et consulté :

  •  sur la mise en œuvre de l’activité partielle, ;
  • sur la modification de l’organisation du travail ;
  • ou encore sur les dérogations aux règles relatives à la durée du travail et aux repos.

Compte tenu de ce champ de compétences, il est donc nécessaire d’anticiper les modalités de communication entre les membres de l’instance évoquées en point n° 3.

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Les principales questions liées à l’activité partielle dans les associations et fondations

Note aux lecteurs : cet article est à jour au 17 mars 2020, date de sa publication.

L’activité partielle est-elle soumise à l’existence d’un chiffre d’affaires ? À l’existence de difficultés économiques ? Est-elle possible dans les établissements sociaux et médico-sociaux ?

Le dispositif d’activité partielle s’adresse aux « entreprises » qui subissent soit une réduction de la durée habituelle du temps de travail dans l’établissement, soit une fermeture temporaire de tout ou partie de l’établissement, en raison de l’une des circonstances suivantes (C. trav., art. L. 5122-1 et R. 5122-1) :

  • une conjoncture économique difficile,
  • des difficultés d’approvisionnement,
  • un sinistre ou des intempéries de caractère exceptionnel,
  • la transformation, la restructuration ou la modernisation de l’entreprise,
  • ou toute autre circonstance de caractère exceptionnel.

C’est précisément sur ce dernier motif que doivent se fonder les structures pour solliciter l’autorisation d’activité partielle liée à l’épidémie.

La circulaire « questions/réponses » du Ministère du Travail sur le Covid-19, mise à jour le 9 mars 2020, confirme d’ailleurs que « Le dispositif d’activité partielle peut être sollicité par les entreprises dans le cadre de circonstances à caractère exceptionnel (article R5122-1 du code du travail). »

Sur ce point, la demande doit explicitement indiquer les effets de l’épidémie de Covid-19 sur l’activité de la structure.

La circulaire donne différents exemples (page 18) de cas éligibles à l’activité partielle, parmi lesquels

« l’Absence (massive) de salariés indispensables à l’activité de l’entreprise » (en particulier en cas de contamination ou placement en quarantaine) ou l’ « Interruption temporaire des activités non essentielles » (« Si les pouvoirs publics décident de limiter les déplacements pour ne pas aggraver l’épidémie, les salariés peuvent être placés en activité partielle »).

Or, le décret n° 2020-260 du 16 mars 2020, publié le 17 mars pour une entrée en vigueur immédiate, prévoit une telle limitation des déplacements :

« Afin de prévenir la propagation du virus covid-19, est interdit jusqu’au 31 mars 2020 le déplacement de toute personne hors de son domicile à l’exception des déplacements pour les motifs suivants, dans le respect des mesures générales de prévention de la propagation du virus et en évitant tout regroupement de personnes :
1° Trajets entre le domicile et le ou les lieux d’exercice de l’activité professionnelle et déplacements professionnels insusceptibles d’être différés ;
2° Déplacements pour effectuer des achats de fournitures nécessaires à l’activité professionnelle et des achats de première nécessité dans des établissements dont les activités demeurent autorisées par arrêté du ministre chargé de la santé pris sur le fondement des dispositions de l’article L. 3131-1 du code de la santé publique ;
3° Déplacements pour motif de santé ;
4° Déplacements pour motif familial impérieux, pour l’assistance des personnes vulnérables ou pour la garde d’enfants ;
5° Déplacements brefs, à proximité du domicile, liés à l’activité physique individuelle des personnes, à l’exclusion de toute pratique sportive collective, et aux besoins des animaux de compagnie.

Les personnes souhaitant bénéficier de l’une de ces exceptions doivent se munir, lors de leurs déplacements hors de leur domicile, d’un document leur permettant de justifier que le déplacement considéré entre dans le champ de l’une de ces exceptions. »

En tout état de cause, ni la « circulaire coronavirus », ni celle du 12 juillet 2013 relative à la mise en œuvre de l’activité partielle, n’excluent du dispositif les structures à but non lucratif.

En conséquence, toutes les structures non lucratives sont bien susceptibles de recourir à l’activité partielle.

S’agissant des ESMS, la difficulté réside en réalité dans l’obligation de continuité des soins (CSP, art. L. 1110-1).

Si l’activité partielle est une mesure collective, elle peut être imputable à la fermeture temporairement d’une partie de l’établissement seulement. En théorie, pourraient donc être concernées les fonctions supports qui ne concourent pas – à tout le moins directement – à la continuité des soins.

Néanmoins, il n’est pas à exclure que la demande d’activité partielle puisse être refusée par l’Administration dès lors que les salariés affectés aux équipes supports sont en mesure de télétravailler… Or, le Ministère encourage vivement les employeurs à recourir au télétravail lorsque celui-ci est possible.

Les salariés peuvent-ils s’opposer à leur placement en activité partielle ?

La mise en activité partielle ne constitue pas une modification du contrat de travail : les salariés ne peuvent donc pas s’opposer à une telle mesure.

En revanche, comme tout changement des conditions de travail, la mise en activité partielle ne peut être imposée aux salariés protégés (Cass. soc., 18 juin 1996, n° 94-44.653). En cas de refus du salarié protégé, l’employeur doit maintenir intégralement sa rémunération. Il a également la possibilité de solliciter l’autorisation de procéder au licenciement du salarié auprès de l’inspection du travail, auquel il appartiendra d’apprécier si le refus est d’une gravité suffisante pour justifier la rupture du contrat de travail.

Après l’annonce de la période de confinement, comment consulter le CSE sur la mise en place de l’activité partielle ?

Le CSE doit impérativement être informé et consulté avant la demande d’activité partielle (C. trav., art. R. 5122-2 et L. 2312-17).

Cette consultation intervient dans le cadre d’une réunion extraordinaire sur convocation du président.

En période de confinement, puisque les déplacements sont interdits sauf dans les cas limitativement énumérés, il conviendrait de réunir le comité en visioconférence.

Pour mémoire, le recours à la visioconférence pour réunir le CSE peut être autorisé par accord entre l’employeur et les membres élus de la délégation du personnel du comité. En l’absence d’accord, ce recours est limité à trois réunions par année civile.

Le dispositif technique doit garantir « l’identification des membres du comité et leur participation effective, en assurant la retransmission continue et simultanée du son et de l’image des délibérations » (C. trav., art. D. 2315-1).

Si habituellement, la structure n’utilise pas un tel dispositif, de nombreuses solutions en ligne existent (Skype, Microsoft Teams, Hangout Meet, Jitsy…).

Enfin, il convient de ne pas oublier de respecter les règles habituelles de convocation du comité, d’élaboration conjointe de l’ordre du jour avec le secrétaire et sa transmission aux membres au moins 3 jours avant la date de la réunion.

Face à une saturation des demandes, comment procéder à la demande d’activité partielle ?

Dans son « questions-réponses » dernièrement actualisé le 9 mars 2020, le ministère du Travail a rappelé que « il n’est pas toujours possible d’anticiper les demandes d’activité partielle avant le placement des salariés en activité partielle. Dans ce cas, les employeurs sont invités à déposer leur demande d’activité partielle dans un délai raisonnable après le début de la période demandée. »

La saisine de la demande d’activité partielle et d’ouverture du dossier s’effectue directement en ligne sur le site internet : https://activitepartielle.emploi.gouv.fr. Néanmoins, face aux connexions massives sur la plateforme, celle-ci est rapidement devenue inaccessible.

Afin de ne pas pénaliser les employeurs, le ministère du Travail a confirmé, le 16 mars, qu’un délai de 30 jours serait accordé aux entreprises pour déposer leur demande, avec un effet rétroactif.

Si la demande porte sur une période antérieure à 20 jours au moment de la demande, celle-ci devra être spécifiquement motivée.

Par ailleurs, le Ministère a annoncé qu’un décret serait pris dans les tous prochains jours pour réformer le dispositif d’activité partielle, afin de couvrir 100 % des indemnisations versées aux salariés, dans la limite de 4,5 SMIC.

Il est donc possible d’attendre la publication du décret – dont nous vous informerons – pour procéder à la demande d’activité partielle.

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Nouvelles précisions sur la mise en place du CSE

Article publié dans le magazine Direction[s] n° 184 de mars 2020
Disponible en téléchargement PDF à la fin de l’article et consultable sur le site internet de Direction[s].

À l’heure où la plupart des structures doivent avoir élu leur comité social et économique (CSE), les dispositions relatives à la nouvelle instance représentative du personnel ont été récemment précisées par la jurisprudence et par le ministère du Travail.

Depuis  le  1er janvier 2020, les entreprises ayant atteint le seuil de  11  salariés pendant 12 mois consécutifs doivent avoir mis en place le comité social et économique (CSE). Outre des précisions apportées par la Cour de cassation, le ministère a actualisé son « questions-réponses » le 16 janvier dernier. Sélection des apports les plus significatifs.

1. Absence de CSE

  • Procès-verbal de carence en cours au 1er janvier 2020

Le Ministère précise que si un procès-verbal (PV) de carence aux élections des délégués du personnel et du comité d’entreprise a été établi avant le 22 septembre 2017, il continue à produire ses effets pour la durée des mandats de l’élection à laquelle il se rap- porte. Dès lors, la structure n’a pas à organiser de nouvelles élections avant cette échéance même si celle-ci est postérieure au 1er janvier 2020. Néanmoins, si une organisation syndicale ou un salarié de la structure concernée le demande, l’employeur devra engager le processus électoral dans le mois qui suit cette requête.

  • Carence de candidats aux élections

L’administration confirme que dans les entreprises dont l’effectif est compris entre 11 et 20 salariés, si aucun d’eux ne se porte candidat dans les 30 jours suivant la diffusion de l’information par l’employeur de l’organisation prochaine des élections, ce dernier est dispensé d’inviter les syndicats à négocier le protocole d’accord préélectoral. Il établit alors un PV de carence et le processus électoral s’achève.

  • Absence irrégulière de CSE

En dehors de ce cas ou de pro-rogation des mandats à la suite de la saisine de la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) ou du tribunal d’instance, le ministère rappelle que la seule absence d’installation d’un CSE au 31 décembre 2019 peut caractériser une entrave à sa mise en place,  infraction pénale punie d’un an d’emprison- nement et 7500 euros d’amende. Néanmoins, l’administration semble vouloir faire preuve de tolérance en indiquant que, dès les premières semaines de 2020, ses services déconcentrés se rapprocheront des employeurs qui l’auraient omis pour que soit engagé au plus vite le processus électoral. Et si ces demandes n’étaient pas suivies d’effet, alors l’employeur s’exposerait à un constat d’infraction par l’inspecteur du travail [1].

Attention toutefois, indépendamment du délit d’entrave, l’employeur risque qu’un salarié réclame l’allocation de dommages-intérêts devant le conseil de prud’hommes. Très récemment, la Cour de cassation a rappelé que l’employeur qui n’a pas accompli – bien qu’il y soit légalement tenu – les diligences nécessaires à l’installation d’institutions représentatives du personnel (IRP), sans qu’un PV de carence soit établi, commet une faute causant un préjudice aux salariés alors privés d’une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts [2].

Par ailleurs, l’absence de CSE a nécessairement des conséquences sur la vie de la structure, en particulier concernant les informations et consultations obligatoires qui ne pourront pas être menées. Par exemple, il ne sera pas possible de dénoncer un usage, un engagement unilatéral ou un accord collectif dès lors que, pour être opposable aux salariés, cette procédure doit avoir fait l’objet d’une information préalable aux IRP.

2. Représentants de proximité et syndical

  • Représentants de proximité

En principe, les représentants de proximité peuvent être institués par l’accord collectif d’entreprise fixant le nombre et le périmètre des établissements distincts. Une interrogation restait à éclaircir : en l’absence de clause en ce sens ou d’accord collectif, l’employeur peut-il les instituer unilatérale- ment ? Le ministère semble répondre par la négative en précisant que dans le cas où les établissements distincts ont été déterminés par décision unilatérale de l’employeur, seul un accord collectif majoritaire en cours de cycle pourra s’en charger. Les associations auront ainsi l’opportunité d’évaluer l’efficacité de l’architecture de la représentation du personnel retenue et, au besoin, pourront mettre en place ultérieurement des représentants de proximité pour corriger certaines carences.

  • Représentant syndical au CSE

La Cour de cassation rappelle qu’il est interdit de cumuler un mandat de membre élu du CSE, titulaire ou suppléant, et de représentant syndical au comité, un accord collectif ne pouvant déroger à cette règle. En tel cas, l’intéressé devra choisir entre ses mandats. À défaut, celui de représentant syndical est caduc [3].

Commission Santé, Sécurité et Conditions de Travail (CSSCT)

  • Composition

Selon le ministère, le représentant syndical au CSE ne peut être désigné au sein de la commission santé sécurité et conditions de travail (CSSCT) « dans la mesure où il n’est pas membre à part entière du CSE, disposant d’une voix consultative et non pas délibérative ». Cet argument est discutable puisque les élus suppléants ne disposent pas non plus d’une voix délibérative. En revanche, la loi vise les représentants du personnel, ce que n’est effectivement pas le représentant syndical. Rappelons que la composition comme les modalités de désigna- tion des membres de la CSSCT sont d’ordre public. Sur ce dernier point, la Cour de cassation a récemment précisé qu’un vote du CSE à la majorité des présents est nécessaire, que la CSSCT soit obligatoire ou conventionnelle [4].

  • Attributions

Légalement, la CSSCT se voit confier, « par délégation » du CSE, tout ou partie des attributions du comité relatives à la santé, à la sécurité et aux conditions de travail, à l’exception du recours à un expert et des attributions consultatives. Aussi, revient-il à l’accord d’entreprise déterminant le nombre et le périmètre des établissements distincts de fixer notamment les missions confiées à la CSSCT.

Une question restait toutefois en suspens : puisque la CSSCT n’est qu’une composante du CSE, ce dernier peut-il lui déléguer des tâches qui n’auraient pas été prévues par l’accord collectif ? Il semblerait que non selon le ministère qui indique que « c’est bien l’accord d’entreprise […] qui définit les attributions SSCT du CSE qui seront déléguées à la commission » [5]. Au vu de la variété des clauses contenues dans les accords collectifs qui, parfois, se contentent de rappeler les termes de l’article L2315-38 du Code du travail sans détailler ces attributions, la jurisprudence ne devrait pas manquer d’occasions pour se prononcer à ce sujet.

  • Fonctionnement

En principe, il revient également aux partenaires sociaux d’établir les modalités de fonctionnement de la commission, notamment le nombre d’heures de délégation dont bénéficient les membres. générale du travail (DGT), il est obligatoire de leur accorder un tel crédit d’heures spécifique afin d’être en mesure d’exercer leurs fonctions [6].

Par ailleurs, la DGT indique que les modalités non précisées par accord collectif pourraient être déterminées par accord entre l’employeur et le CSE ou par le règlement intérieur du comité [7]. Rappelons toutefois que ce dernier ne peut comporter pour l’employeur, sans son accord, d’obligations qui ne résulteraient pas de dispositions légales. Le cas échéant, cet accord constitue un engagement unilatéral que l’employeur peut dénoncer à l’issue d’un délai raisonnable et après en avoir informé les membres de la délégation du personnel du CSE.

  • Formation

Ces derniers doivent bénéficier de la formation nécessaire à l’exercice de leurs missions en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail. Toutefois, la loi dispose que cette formation « des membres » de la CSSCT est d’une durée de trois ou cinq jours selon que l’entreprise compte plus ou moins de 300 salariés. L’administration en déduit que cette durée minimale est réservée aux seuls membres de la commission, tout en encourageant une durée équivalente pour les autres membres du CSE. Mais une autre interprétation pourrait être retenue par un juge dès lors qu’est visé l’article L2315-18 du Code du travail,  relatif  à la formation SSCT dispensée à l’ensemble des membres du CSE. La prudence appelle donc à allouer le même temps de formation à tous les élus, membres ou non de la CSSCT.

Cécile Noël,

Juriste, Picard avocats

[1] CSE: Quelles conséquences en cas d’absence de mise en place?, à consul- ter  sur   https://travail-emploi.gouv.fr
[2] Cass. soc., 8 janv. 2020, n° 18-20.591
[3] Cass. soc., 22 janv. 2020, n° 19-13.269
[4] Cass.  soc.,  27  nov.  2019,  n° 19-14.224
[5] Foire aux questions diffusée par la DGT aux avocats, Q. n° 31
[6] F.A.Q. diffusée aux avocats, Q. n° 32
[7] F.A.Q. diffusée aux avocats, Q. n° 30

RÉFÉRENCES

« Comité social et économique : 117 questions-réponses », à consulter sur https://travail-emploi.gouv.fr
Code du travail, articles L2314-8, L2314-5 al. 5, L2317-1, L2313-7, L2315-38, L2315-41, 2°, L2315-41, L2315-24, L2315-18, L2315-40

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Les règles de suppléance du CSE

Un élu du CSE est absent, qui doit le remplacer ? Contrairement à certaines idées reçues, un titulaire n’a pas de suppléant attitré, pas plus qu’il n’a le choix de son suppléant… Les règles sont strictement fixées par le Code du travail ! Explications ↓