Catégories
Infographies

Employeurs : check-list des obligations sociales avant le 31 décembre !

Catégories
Newsletters

L’ESSentiel – Juillet & Août 2020

Le 22ème numéro de l’ESSentiel, la newsletter en droit du travail pour les acteurs du secteur, est disponible !

Au menu de cette édition estivale à lire sur la plage comme au bureau, la prime Covid pour les salariés multi-employeurs, le sort de l’activité partielle dérogatoire, les principales mesures du troisième projet de loi de finances, un décryptage des dernières jurisprudences et un focus sur le renouvellement et la succession de salariés avec un même salarié.

Bonne lecture,

L’équipe Picard avocats

Catégories
Webinaire

[Webinaire] Actualités sociales et crise sanitaire

Le 6 juillet 2020, le Cabinet organisait, en partenariat avec l’URIOPSS Ile-de-France, un webinaire autour des dernières actualités sociales en lien avec la crise sanitaire : prime Covid pour les établissements sociaux et médico-sociaux, prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, télétravail, activité partielle dérogatoire et reconnaissance du Covid-19 comme maladie professionnelle.

Vous l’avez manqué ? Retrouvez le replay ci-après !

Catégories
Newsletters

L’ESSentiel – Juin 2020

L’ESSentiel se déconfine avec la sortie de son 21ème numéro !

Au menu de cette nouvelle édition : la prime Covid à l’épreuve de l’égalité de traitement, les nouveautés en matière d’activité partielle, de CDD et de prêt de personnel à but non lucratif, une sélection des dernières jurisprudences et un focus sur le télétravail à l’heure du déconfinement.

Bonne lecture !

L’équipe Picard avocats

Catégories
Flash Info

Prime ESMS : entre avancée et incertitude

Note aux lecteurs : cet article est à jour au 24 juin 2020, date de sa publication.

Nous l’évoquions dans notre précédent article sur le sujet : si l’instruction du 5 juin 2020 et son annexe 10 ont dévoilé les premiers contours de la « prime Covid » pour les établissements sociaux et médico-sociaux, de nombreuses zones d’ombres demeurent sur les modalités de mise en place et de financement de cette prime.

Aussi, les communications et prises de position diverses émanant des autorités de tutelle n’ont fait que renforcer les interrogations des organismes gestionnaires.

Si l’instruction du 5 juin 2020 entérine  le financement par l’ars et apporte des précisions pour les établissements financés ou cofinancés par l’Assurance Maladie, ceux financés par les conseils départementaux (CD) apparaissaient dépendants des volontés de leurs financeurs…

Une question revient alors fréquemment : cette prime peut-elle ou doit-elle être versée compte tenu des seules exigences fixées par ces autorités ?

Les associations gérant des structures aux financements divers se retrouvent en effet confrontées à la difficile conciliation entre financement de la prime et respect du principe d’égalité de traitement entre les salariés.

Les actions des acteurs du secteur semblent néanmoins avoir porté leur fruit puisqu’un amendement adopté ce 23 juin en Commission des Finances vient introduire dans la troisième loi de finances rectificative le principe d’une prime de 1.500 euros pour la quasi intégralité des ESMS.

Aussi, cet amendement n’opère aucune distinction entre les établissements selon leur mode de financement.

Les associations disposant de financement ARS et CD pourraient donc ne plus avoir à se poser la difficile question de l’articulation entre la prime « PEPA » et la prime « ESMS » dont le financement est pris en charge pour les structures financées par l’ARS eu égard à l’instruction du 5 juin 2020.

Toutefois, il reste encore des zones d’ombres et la prudence est encore de mise.

En particulier, cet amendement proposé (et adopté) par le rapporteur général de la commission et membre de la majorité parlementaire, laisse la possibilité pour les ESMS de verser ou non cette prime.

Dès lors, et quand bien même l’amendement prévoit une dispense d’agrément de la DUE ou de l’accord collectif, la question de l’opposabilité de ce texte et donc de la prime aux conseils départementaux reste entière. Cette opposabilité ne pose pas question pour les structures / établissements financés par l’ARS compte tenu de l’instruction du 5 juin diffusée et qui doit être prochainement publiée.

En effet, beaucoup de CD ont d’ores et déjà communiqué sur le financement d’une prime « PEPA » ou d’une prime « ESMS » – ce qui témoigne de la confusion opérée entre les deux dispositifs pourtant distincts – selon des critères « maison » dont la sécurité juridique peut laisser perplexe.

De nombreuses associations financées par les CD ont également déjà communiqué auprès des salariés concernant le versement rapide d’une telle prime… Un rétropédalage pourrait être judicieux dans l’attente des éclaircissements sur les modalités définitives de la prime « ESMS » et son opposabilité aux CD.

Il est donc vivement recommandé de patienter, étant précisé que le texte définitif pourrait intervenir dans le courant du mois de juillet. La publication d’un décret précisant la mise en œuvre de la prime n’est pas à exclure (à l’instar de la prime octroyée dans la fonction publique) mais n’est à ce jour pas prévue en l’état de la rédaction de l’amendement.

Soulignons enfin que l’amendement prévoit une entrée en vigueur rétroactive au 1er juin… Indéniablement pour entériner les termes de l’annexe 10 à l’instruction du 5 juin, qui ouvrent la possibilité de verser la prime avant la publication des textes l’instituant.

Mais comment articuler un versement rapide et financé avec la sécurité juridique de l’opération ?

La manœuvre apparaît délicate et nous ne pouvons que déconseiller de naviguer à vue. À suivre !

Catégories
Recrutement

Offre de stage

M.A.J. : Nous avons trouvé notre futur stagiaire !

Le cabinet propose un stage pour la période estivale, du 29 juin au 28 août (dates ajustables), éventuellement renouvelable.

Si vous souhaitez rejoindre une équipe jeune et soudée qui travaille dans une ambiance et un cadre agréables, nous serions ravis de vous accueillir !

Nous accompagnons quotidiennement en conseil, contentieux et formation une clientèle d’employeurs principalement composée d’associations, de fondations et de fédérations patronales du secteur de l’économie sociale et solidaire (sanitaire, social, médico-social, aide à domicile, insertion, animation, formation).

Si nous privilégions des profils issus d’un Master I / Master II en droit social, nous sommes ouverts à tout candidat souhaitant découvrir ou approfondir la pratique du droit social.

Nous aurons à cœur de vous former et de vous intégrer pleinement dans les dossiers du cabinet !

Le stage est rémunéré selon gratification conventionnelle et profil.

Vous pouvez postuler en envoyant un mail à recrutement@picard-avocats.com.

À très vite 🙂

Catégories
Webinaire

[Webinaire] La responsabilité de l’employeur face au Covid-19

Le 16 juin 2020, le Cabinet organisait en partenariat avec le Magazine Direction[s] et la Fédération Nationale des Acteurs de la Solidarité, un webinaire sur la responsabilité civile et pénale de l’employeur durant le contexte épidémique.

Vous l’avez manqué ? Retrouvez le replay ci-après !

Catégories
Flash Info

Prime exceptionnelle de pouvoir d’achat : actualisation de l’instruction interministérielle

Note aux lecteurs : cet article est à jour au 5 mai 2020, date de sa publication.

La tant attendue instruction interministérielle n° DSS/5B/2020/59 du 16 avril 2020 relative à la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat, portant mise à jour du « questions-réponses » annexé à l’instruction du 15 janvier 2020, vient d’être diffusée ce jour sur le site de la sécurité sociale !

En synthèse, la nouvelle instruction reprend les précisions qui avaient été apportées le 17 avril 2020 sur le site internet du Ministère du Travail. Vous trouverez, ci-après, l’analyse des principales modifications opérées par rapport à l’instruction du 15 janvier 2020.

Les conditions de travail liées au Covid-19 : critère de modulation et/ou d’exclusion ?

Dès les premières lignes, l’instruction précise qu’ « afin de prendre en compte plus particulièrement les salariés ayant permis le maintien de l’activité pendant l’épidémie de Covid-19, l’ordonnance prévoit un nouveau critère possible de modulation du montant de la prime permettant de tenir compte des conditions de travail liées à l’épidémie. »

À ce stade, la lettre de l’instruction est donc parfaitement conforme aux termes de l’ordonnance n° 2020- 385 du 1er avril 2020. Néanmoins, au sein du « questions-réponses » annexé, l’instruction reprend dans des termes strictement identiques les précisions apportées par le Ministère du travail le 17 avril :

« 1.5 La prime peut-elle être versée à une partie seulement des salariés ? OUI,

– Soit par l’exclusion d’une partie des salariés dont la rémunération est supérieure à un plafond. (…)
– Soit à raison des conditions de travail liées à l’épidémie de Covid-19 (cf. points 2.3 à 2.6 et 2.11)
(…) 2.6 Une entreprise peut-elle exclure du versement des salariés qui n’étaient pas présents pendant la période d’urgence sanitaire ?
OUI. L’objectif du nouveau cas de modulation prévu par l’ordonnance 202-385 est de permettre de récompenser la possibilité de prendre en compte la présence effective du salarié, en excluant, par exemple, les salariés en télétravail.
(…) 2.11 La modulation en fonction des conditions de travail pendant la période d’urgence sanitaire peut-elle aboutir, pour certains salariés, à une prime exceptionnelle égale à zéro ?
OUI. La modulation du montant de la prime, en fonction des conditions de travail pendant la période d’urgence sanitaire, peut permettre le versement d’un montant compris entre 0 et 1000 euros, seuil porté à 2000 € en cas de mise en oeuvre d’un accord d’intéressement. »

Or et comme nous l’évoquions dans notre flash info du 18 avril, l’article 7 de la LFSS pour 2020 précise que la prime « peut être attribuée par l’employeur à l’ensemble des salariés et des agents qu’il emploie ou à ceux dont la rémunération est inférieure à un plafond » (I-C).

À la stricte lecture de la loi, le seul critère permettant d’exclure des salariés du bénéfice de la prime est donc celui du plafond de rémunération. Dans le même sens, au sein des dispositions légales, le critère des conditions de travail liées au Covid-19 figure seulement parmi les critères de modulation du montant de la prime, au même titre que le niveau de classification ou la durée de présence effective pendant l’année écoulée par exemple (II 2°).

Ainsi, l’instruction confirme l’interprétation particulièrement extensive du Ministère. Or, rappelons que cette interprétation est inopposable en cas de contentieux, ce que ne manque pas de rappeler l’instruction elle-même : « Interprétation à retenir, sous réserve de l’appréciation souveraine du juge (…) ».

D’ailleurs, très récemment, la Cour de cassation a rappelé qu’une « convention collective, si elle manque de clarté, doit être interprétée comme la loi, c’est à dire d’abord en respectant la lettre du texte, ensuite en tenant compte d’un éventuel texte législatif ayant le même objet et, en dernier recours, en utilisant la méthode téléologique consistant à rechercher l’objectif social du texte»[1].

Si « l’objectif social » de l’ordonnance du 1er avril était effectivement de permettre aux employeurs de récompenser les salariés ayant maintenu une activité durant le contexte épidémique, la lettre du texte fait preuve de bien moins de souplesse.

Selon nous, il convient donc de rester vigilants face à une telle interprétation. En effet, en cas de litige, des salariés ayant été exclus du bénéfice de la prime pourraient être susceptibles de solliciter, par voie contentieuse, le versement de celle-ci. À notre sens, il demeure préconisé, quels que soient les critères de modulation retenus, de prévoir un montant « plancher » de versement de la PEPA, même relativement faible.

En revanche, lorsqu’une PEPA a déjà été versée avant le 1er avril, il serait possible, comme l’indique l’instruction (5.4), de procéder à un second versement sur le fondement des conditions de travail liées au Covid-19, en excluant les salariés non concernés par celui-ci.

En effet, en telle hypothèse, il ne s’agit que d’une prime unique versée en deux échéances. Tous les salariés éligibles ayant d’ores et déjà bénéficié d’un premier versement, ils ne sont pas exclus purement et simplement du dispositif, quand bien même le second versement ne ferait qu’application du critère de modulation « Covid ».

Le cadre temporel du critère « Covid »

L’instruction (2.5) précise que « La prime peut être modulée pour l’ensemble des salariés ayant continué leur activité durant la période d’urgence sanitaire (qui a débuté le 12 mars 2020) (…) ».

Or, l’état d’urgence sanitaire n’a pas débuté le jeudi 12 mars (qui correspond en réalité à la date fixée pour la période dite « protégée », notamment pour les délais de procédure) mais le mardi 24 mars[2], et cela jusqu’au 24 mai 2020[3]. D’ailleurs, le confinement n’a débuté que le 17 mars. Au 12 mars, il est donc discutable de considérer que les conditions de travail des salariés étaient impactées par le Covid-19.

Il est donc préconisé, pour l’appréciation du critère « Covid » :

  • soit de retenir une date de début au 24 mars, en se référant expressément à la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 ;
  • soit de retenir la date du 12 mars, en se référant aux précisions données par l’instruction interministérielle n° DSS/5B/2020/59 du 16 avril 2020.
Les congés liés à la parentalité

L’instruction précise (2.4) que pour le seul critère afférent aux conditions de travail liées à l’épidémie de Covid-19, les salariés absents pour des congés liés à la parentalité peuvent être exclus de la prime :

« (…) pour que la prime soit éligible à l’exonération, il n’est pas autorisé d’en réduire le montant à raison des (…) congés au titre de la maternité, de la paternité et de l’accueil ou de l’adoption d’un enfant, ainsi que des congés d’éducation parentale, de présence parentale. La prime des salariés absents du fait de l’un de ces congés ne peut être réduite à raison de cette absence, sauf dans les cas où la prime est modulée en application des points 2.5, 2.6 et 2.11. »

Néanmoins, les dispositions légales telles que modifiées par l’ordonnance du 1er avril continuent de préciser :

« 2° Son montant peut être modulé selon les bénéficiaires en fonction de la rémunération, du niveau de classification, des conditions de travail liées à l’épidémie de covid-19, de la durée de présence effective pendant l’année écoulée ou la durée de travail prévue au contrat de travail mentionnée à la dernière phrase du deuxième alinéa du III de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale. Les congés prévus au chapitre V du titre II du livre II de la première partie du code du travail sont assimilés à des périodes de présence effective »

Or, l’instruction évoque elle-même, s’agissant du critère « Covid », la notion de « présence effective » :

« L’objectif du nouveau cas de modulation prévu par l’ordonnance 202-385 est de permettre de récompenser la possibilité de [coquille] prendre en compte la présence effective du salarié, en excluant, par exemple, les salariés en télétravail. »

Là encore, il sera rappelé que la lettre des dispositions légales prime tant sur la volonté de ses rédacteurs que sur l’interprétation qui en est faite par l’Administration.

Néanmoins, des arguments pourraient tout de même défendre la possibilité d’exclure les salariés en congé lié à la parentalité du « critère Covid » :

  • Le texte indique que les congés liés à la parentalité « sont assimilés à des périodes de présence effective » pour le bénéfice de la prime. Or :
  • le critère de conditions de travail liées à l’épidémie de covid-19, telle que rédigé dans la loi, ne se réfère pas réellement à une condition de présence effective (sinon, le législateur aurait pu préciser une présence effective « durant l’épidémie de covid-19 »), mais vise seulement des conditions de travail particulières ;
  • les salariés absents, quand bien même leur absence serait assimilée à du temps de présence effective, n’ont par définition pas pu voir leurs conditions de travail impactées par l’épidémie, contrairement aux salariés en télétravail ou présents sur le terrain ;
  • Les salariés absents ne sauraient invoquer une quelconque discrimination dès lors que toutes les absences sont traitées de la même manière[4].

Ainsi, le risque principal serait non celui – mesuré – de la discrimination mais davantage celui d’un rappel de prime sollicité par les salariés en congés liés à la parentalité, suivant les termes de l’article 7 de la LFSS. Là encore, le fait d’allouer un montant « plancher » à tous les salariés, même faible, permettrait d’amoindrir les risques contentieux.

Si une PEPA a déjà été versée et qu’un complément est envisagé, peut-on subordonner le versement d’un complément de prime à une « rallonge » des financeurs ?

Selon nous, rien ne s’oppose à ce qu’il soit précisé, dans l’avenant à l’accord collectif ou dans la DUE instituant le complément de prime, que son versement soit subordonné à l’acceptation expresse de l’autorité de tutelle d’une prise en charge budgétaire supplémentaire.

En tel cas, l’acte est conclu sous condition suspensive d’un accord exprès des financeurs. À défaut d’avoir obtenu un tel aval écrit dans un délai fixé par l’avenant ou la DUE, ce dernier ou cette dernière serait caduc.

À noter : l’instruction indique que « Les entreprises ayant déjà versé une prime exceptionnelle sur la base de l’article 7 de la LFSS pour 2020 pourront compléter leur versement initial par un avenant à la convention ou à la DUE. » À notre sens, il s’agirait d’une seconde DUE « complémentaire » à la première et non d’un avenant à celle-ci. En effet, la jurisprudence se montre réfractaire, en dehors de toute dénonciation régulière, à la possibilité de modifier une décision unilatérale, quelle qu’elle soit.

Enfin, l’instruction rappelle une distinction qu’il convient d’opérer :

  • Si une PEPA a déjà été versée sur la base de l’article 7 de la LFSS pour 2020 dans sa version antérieure au 1er avril 2020, la structure pourra envisager un versement complémentaire sur le seul fondement du critère des conditions de travail liées à l’épidémie de Covid-19 ;
  • Si l’accord ou la DUE instituant la PEPA est conclu à partir du 1er avril 2020, il est possible de prévoir plusieurs échéances de versement mais les critères d’attribution doivent être strictement identiques pour chacune des échéances.
Question fréquente : quelle valeur juridique pour cette instruction interministérielle ?

S’il convient d’adopter la plus grande prudence vis-à-vis des précisons diffusées sur les sites internet ministériels ou de l’URSSAF, l’instruction du 15 janvier 2020 a été publiée le 16 mars parmi la liste des documents opposables sur le site du Ministère des Solidarités et de la Santé ainsi qu’au bulletin officiel de ce même Ministère. Cela rendait le texte opposable à l’Administration en cas de contrôle, même en l’absence de « double publication » sur le site « circulaires.legifrance.gouv.fr »[5].

À ce jour, l’instruction n° DSS/5B/2020/59 du 16 avril 2020 n’a été publiée que sur le site internet de la sécurité sociale, qui est inopposable à l’Administration en cas de contrôle. Néanmoins, la publication « officielle » de l’instruction du 15 janvier a pris du temps (2 mois). Il devrait donc en être de même pour celle du 16 avril, dont la publication est attendue afin de sécuriser, au moins vis-à-vis de l’URSSAF, les interprétations administratives. [Mise à jour : l’instruction a été publiée sur le site du Ministère des Solidarités et de la Santé le 15 mai 2020]

[1] Cass. soc., 25 mars 2020, n° 18-12.467
[2] Loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19
[3] Cette date devrait être prorogée au 24 juillet 2020, selon le projet de loi actuellement soumis au Parlement
[4] Par exemple : Cass. soc., 17 octobre 2007, n° 06-40.311
[5] CRPA, art. L.312-3 et D.312-11

Catégories
Newsletters

L’ESSentiel – Avril 2020

L’ESSentiel du mois d’avril est arrivée !

Au menu de cette édition, un guide d’interprétation des textes conventionnels, un point sur la procédure d’agrément, les évolutions à venir en matière d’activité partielle et de reprise d’activité, une sélection des dernières jurisprudences ainsi qu’un focus sur les tests de dépistage et de température.

Bonne lecture !

Catégories
Articles

Les réunions du CSE pendant la période de confinement

Note aux lecteurs : cet article est à jour au 20 mars 2020, date de sa publication.

1. En cas de fermeture temporaire de l’établissement, la tenue des réunions du CSE est-elle suspendue ?

Le Code du travail ne prévoit aucune circonstance emportant, pour l’employeur, une suspension de ses obligations envers le CSE.

Dans l’attente du contenu des ordonnances (dont la publication est prévue pour le début de la semaine prochaine), la « vie du CSE » suit donc son cours et, notamment, la tenue des réunions périodiques de l’instance.

Pour mémoire, s’agissant du nombre de réunions du CSE :

  • dans les structures de moins de 50 salariés, les membres du CSE sont réunis au moins une fois par mois ;
  • dans celles de 50 salariés et plus, le nombre de réunions peut être fixé par accord d’entreprise majoritaire (minimum 6 dont 4 portant sur les questions de santé, de sécurité et de conditions de travail). À défaut, ce nombre est fixé à une par mois minimum dans les structures d’au moins 300 salariés et une tous les deux mois dans celles de moins de 300 salariés.

En présence d’un accord collectif fixant la périodicité des réunions ordinaires, il pourrait être envisageable de conclure avec les délégués syndicaux un avenant de révision temporaire venant modifier cette périodicité pour l’adapter aux circonstances (par exemple, en prévoyant davantage de réunions périodiques pour le second semestre).

A défaut d’accord collectif, il serait envisageable que l’employeur s’accorde à ce sujet avec les membres du CSE. Rien n’est prévu à ce sujet par les textes… Mais à circonstances exceptionnelles, mesures exceptionnelles !

2. Dois-je convoquer un salarié placé en activité partielle ? Un salarié en arrêt maladie, notamment en cas d’impossibilité de trouver un mode de garde pour ses enfants ?

Le placement du salarié en activité partielle (pendant les périodes où il n’est pas en activité), tout comme l’arrêt maladie, emporte suspension de son contrat de travail.

Toutefois, comme toute suspension du contrat de travail, l’activité partielle et l’arrêt maladie n’ont aucune incidence sur l’exercice du mandat du représentant du personnel ou syndical qui n’est pas suspendu.

Il convient donc d’inviter les salariés concernés aux réunions du CSE, sans qu’il ne soit nécessaire de mettre en œuvre les règles de suppléance (sauf bien sûr à ce que le salarié soit effectivement absent/indisponible lors de la réunion).

3. Comment réunir le CSE en préservant la santé des représentants du personnel ?

Selon la circulaire « questions-réponses » du Ministère du Travail relative au Covid-19 (mise à jour au 17 mars 2020), « Le recours à la visioconférence est encouragé si nécessaire pour éviter les contacts physiques ».

En principe, le recours à la visioconférence pour réunir le CSE peut être autorisé par accord entre l’employeur et les membres élus de la délégation du personnel au CSE (C. trav., art. L. 2315-4).

En l’absence d’accord, l’employeur peut réunir le CSE par visioconférence trois fois par année civile.

Le dispositif technique doit garantir l’identification des membres du comité et leur participation effective, en assurant la retransmission continue et simultanée du son et de l’image des délibérations.

Les articles D. 2315-1 et D. 2315-2 du Code du travail déterminent les conditions dans lesquelles le CSE peut, dans ce cadre, procéder à un vote à bulletin secret.

Si habituellement, la structure n’utilise pas un tel dispositif, de nombreuses solutions en ligne existent (Skype, Microsoft Teams, Hangout Meet, Jitsy…).

Naturellement, afin de recourir à un tel dispositif, il conviendra de s’assurer que chaque élu dispose des moyens de télécommunication nécessaires pour participer à la réunion en visioconférence.

Même si une telle obligation n’est pas prévue par les textes, il est préconisé d’informer l’inspecteur du travail, l’agent des services de prévention de la sécurité sociale, le médecin du travail et le responsable interne du service de sécurité et des conditions de travail de la décision de tenir les réunions par visioconférence (puisque ces personnes sont amenées à être conviées aux réunions).

Enfin, il convient de ne pas oublier de respecter les règles habituelles de convocation du comité (laquelle devra notamment mentionner les modalités de connexion à la plateforme de visioconférence), d’élaboration conjointe de l’ordre du jour avec le secrétaire et sa transmission aux membres au moins 3 jours avant la date de la réunion.

En tout état de cause, il reste également possible de réunir le CSE en présentiel au sein de la structure, en particulier lorsque les élus ne sont pas placés en télétravail ou en activité partiel.

En telle hypothèse, il conviendra de veiller à respecter tous les gestes « barrières », notamment :

  • saluer les personnes présentes à la réunion  sans leur serrer la main ;
  • laisser une distance d’au moins un mètre en chaque personne présente ;
  • ne pas échanger de documents papiers lors de celle-ci.

Aussi, il pourrait tout à fait être envisagé de combiner la visioconférence et la réunion en présentiel, par exemple si des élus sont présents dans l’établissement lors de la réunion pendant que d’autres sont à leur domicile.

La direction assurerait la retransmission de la visioconférence au sein de la salle de réunion avec les élus présents, et les élus présents à leur domicile se connecteraient au dispositif de visioconférence.

Il est enfin à noter que seule la visioconférence est prévue par les textes et non la conférence téléphonique

Néanmoins, compte tenu des circonstances pour le moins exceptionnelles et si tel est le souhait des représentants du personnel, il pourrait être envisageable de s’accorder – par délibération et avec l’accord du président – sur la tenue de réunions téléphoniques afin de faciliter le bon fonctionnement de l’instance.

4. Pendant ces circonstances exceptionnelles, à quelles mesures doit-être associé le CSE ?

La gestion de l’épidémie de Covid-19 relève des attributions du CSE à plusieurs égards.

En premier lieu, le CSE a pour mission de promouvoir la santé, la sécurité et l’amélioration des conditions de travail dans son périmètre.

À ce titre :

  • Le comité peut être réuni à la demande motivée de deux de ses membres, sur des sujets relevant de la santé, de la sécurité ou des conditions de travail ;
  • Chaque membre dispose également d’un droit d’alerte en cas de « danger grave et imminent » (cela pourrait par exemple être le cas en présence d’un salarié qui travaille alors qu’il présente les symptômes du Coronavirus) ;
  • Le comité peut procéder à des inspections en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail (par exemple, sur le respect des mesures « barrières » dans l’établissement et la mise à disposition de matériel de prévention) ;
  • Plus généralement, le comité formule, à son initiative, et examine, à la demande de l’employeur, toute proposition de nature à améliorer les conditions de travail des salariés.

En particulier, en cette période de crise sanitaire, le CSE devra impérativement être associé à la démarche d’évaluation/actualisation des risques et consulté sur la mise à jour du document unique d’évaluation des risques (DUER).

Le Gouvernement attire en effet l’attention des employeurs sur la nécessité de procéder à l’évaluation des risques en tenant compte des modalités de contamination du Covid-19, particulièrement de la notion de « contact étroit », et d’actualiser le document unique d’évaluation des risques en associant le CSE et le service de santé au travail.

Le DUER devra identifier les situations de travail réunissant les critères suivants : même lieu de vie, contact direct à moins d’un mètre lors d’une toux, d’un éternuement ou d’une discussion de plus de 15 minutes en l’absence de mesures de protection, le risque étant multiplié en cas de contact des mains non lavées.

Il est absolument nécessaire de procéder à cette évaluation et cette actualisation afin de remplir l’obligation de prévention des risques professionnels incombant à l’employeur, au titre de son obligation de sécurité.

En second lieu, dans les structures de 50 salariés et plus, le CSE est informé et consulté sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise, notamment sur la durée du travail ou les conditions d’emploi, de travail et de formation professionnelle ainsi que sur tout aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail. 

C’est à ce titre que le CSE doit, par exemple, être informé et consulté :

  •  sur la mise en œuvre de l’activité partielle, ;
  • sur la modification de l’organisation du travail ;
  • ou encore sur les dérogations aux règles relatives à la durée du travail et aux repos.

Compte tenu de ce champ de compétences, il est donc nécessaire d’anticiper les modalités de communication entre les membres de l’instance évoquées en point n° 3.

Catégories
Articles

Les principales questions liées à l’activité partielle dans les associations et fondations

Note aux lecteurs : cet article est à jour au 17 mars 2020, date de sa publication.

L’activité partielle est-elle soumise à l’existence d’un chiffre d’affaires ? À l’existence de difficultés économiques ? Est-elle possible dans les établissements sociaux et médico-sociaux ?

Le dispositif d’activité partielle s’adresse aux « entreprises » qui subissent soit une réduction de la durée habituelle du temps de travail dans l’établissement, soit une fermeture temporaire de tout ou partie de l’établissement, en raison de l’une des circonstances suivantes (C. trav., art. L. 5122-1 et R. 5122-1) :

  • une conjoncture économique difficile,
  • des difficultés d’approvisionnement,
  • un sinistre ou des intempéries de caractère exceptionnel,
  • la transformation, la restructuration ou la modernisation de l’entreprise,
  • ou toute autre circonstance de caractère exceptionnel.

C’est précisément sur ce dernier motif que doivent se fonder les structures pour solliciter l’autorisation d’activité partielle liée à l’épidémie.

La circulaire « questions/réponses » du Ministère du Travail sur le Covid-19, mise à jour le 9 mars 2020, confirme d’ailleurs que « Le dispositif d’activité partielle peut être sollicité par les entreprises dans le cadre de circonstances à caractère exceptionnel (article R5122-1 du code du travail). »

Sur ce point, la demande doit explicitement indiquer les effets de l’épidémie de Covid-19 sur l’activité de la structure.

La circulaire donne différents exemples (page 18) de cas éligibles à l’activité partielle, parmi lesquels

« l’Absence (massive) de salariés indispensables à l’activité de l’entreprise » (en particulier en cas de contamination ou placement en quarantaine) ou l’ « Interruption temporaire des activités non essentielles » (« Si les pouvoirs publics décident de limiter les déplacements pour ne pas aggraver l’épidémie, les salariés peuvent être placés en activité partielle »).

Or, le décret n° 2020-260 du 16 mars 2020, publié le 17 mars pour une entrée en vigueur immédiate, prévoit une telle limitation des déplacements :

« Afin de prévenir la propagation du virus covid-19, est interdit jusqu’au 31 mars 2020 le déplacement de toute personne hors de son domicile à l’exception des déplacements pour les motifs suivants, dans le respect des mesures générales de prévention de la propagation du virus et en évitant tout regroupement de personnes :
1° Trajets entre le domicile et le ou les lieux d’exercice de l’activité professionnelle et déplacements professionnels insusceptibles d’être différés ;
2° Déplacements pour effectuer des achats de fournitures nécessaires à l’activité professionnelle et des achats de première nécessité dans des établissements dont les activités demeurent autorisées par arrêté du ministre chargé de la santé pris sur le fondement des dispositions de l’article L. 3131-1 du code de la santé publique ;
3° Déplacements pour motif de santé ;
4° Déplacements pour motif familial impérieux, pour l’assistance des personnes vulnérables ou pour la garde d’enfants ;
5° Déplacements brefs, à proximité du domicile, liés à l’activité physique individuelle des personnes, à l’exclusion de toute pratique sportive collective, et aux besoins des animaux de compagnie.

Les personnes souhaitant bénéficier de l’une de ces exceptions doivent se munir, lors de leurs déplacements hors de leur domicile, d’un document leur permettant de justifier que le déplacement considéré entre dans le champ de l’une de ces exceptions. »

En tout état de cause, ni la « circulaire coronavirus », ni celle du 12 juillet 2013 relative à la mise en œuvre de l’activité partielle, n’excluent du dispositif les structures à but non lucratif.

En conséquence, toutes les structures non lucratives sont bien susceptibles de recourir à l’activité partielle.

S’agissant des ESMS, la difficulté réside en réalité dans l’obligation de continuité des soins (CSP, art. L. 1110-1).

Si l’activité partielle est une mesure collective, elle peut être imputable à la fermeture temporairement d’une partie de l’établissement seulement. En théorie, pourraient donc être concernées les fonctions supports qui ne concourent pas – à tout le moins directement – à la continuité des soins.

Néanmoins, il n’est pas à exclure que la demande d’activité partielle puisse être refusée par l’Administration dès lors que les salariés affectés aux équipes supports sont en mesure de télétravailler… Or, le Ministère encourage vivement les employeurs à recourir au télétravail lorsque celui-ci est possible.

Les salariés peuvent-ils s’opposer à leur placement en activité partielle ?

La mise en activité partielle ne constitue pas une modification du contrat de travail : les salariés ne peuvent donc pas s’opposer à une telle mesure.

En revanche, comme tout changement des conditions de travail, la mise en activité partielle ne peut être imposée aux salariés protégés (Cass. soc., 18 juin 1996, n° 94-44.653). En cas de refus du salarié protégé, l’employeur doit maintenir intégralement sa rémunération. Il a également la possibilité de solliciter l’autorisation de procéder au licenciement du salarié auprès de l’inspection du travail, auquel il appartiendra d’apprécier si le refus est d’une gravité suffisante pour justifier la rupture du contrat de travail.

Après l’annonce de la période de confinement, comment consulter le CSE sur la mise en place de l’activité partielle ?

Le CSE doit impérativement être informé et consulté avant la demande d’activité partielle (C. trav., art. R. 5122-2 et L. 2312-17).

Cette consultation intervient dans le cadre d’une réunion extraordinaire sur convocation du président.

En période de confinement, puisque les déplacements sont interdits sauf dans les cas limitativement énumérés, il conviendrait de réunir le comité en visioconférence.

Pour mémoire, le recours à la visioconférence pour réunir le CSE peut être autorisé par accord entre l’employeur et les membres élus de la délégation du personnel du comité. En l’absence d’accord, ce recours est limité à trois réunions par année civile.

Le dispositif technique doit garantir « l’identification des membres du comité et leur participation effective, en assurant la retransmission continue et simultanée du son et de l’image des délibérations » (C. trav., art. D. 2315-1).

Si habituellement, la structure n’utilise pas un tel dispositif, de nombreuses solutions en ligne existent (Skype, Microsoft Teams, Hangout Meet, Jitsy…).

Enfin, il convient de ne pas oublier de respecter les règles habituelles de convocation du comité, d’élaboration conjointe de l’ordre du jour avec le secrétaire et sa transmission aux membres au moins 3 jours avant la date de la réunion.

Face à une saturation des demandes, comment procéder à la demande d’activité partielle ?

Dans son « questions-réponses » dernièrement actualisé le 9 mars 2020, le ministère du Travail a rappelé que « il n’est pas toujours possible d’anticiper les demandes d’activité partielle avant le placement des salariés en activité partielle. Dans ce cas, les employeurs sont invités à déposer leur demande d’activité partielle dans un délai raisonnable après le début de la période demandée. »

La saisine de la demande d’activité partielle et d’ouverture du dossier s’effectue directement en ligne sur le site internet : https://activitepartielle.emploi.gouv.fr. Néanmoins, face aux connexions massives sur la plateforme, celle-ci est rapidement devenue inaccessible.

Afin de ne pas pénaliser les employeurs, le ministère du Travail a confirmé, le 16 mars, qu’un délai de 30 jours serait accordé aux entreprises pour déposer leur demande, avec un effet rétroactif.

Si la demande porte sur une période antérieure à 20 jours au moment de la demande, celle-ci devra être spécifiquement motivée.

Par ailleurs, le Ministère a annoncé qu’un décret serait pris dans les tous prochains jours pour réformer le dispositif d’activité partielle, afin de couvrir 100 % des indemnisations versées aux salariés, dans la limite de 4,5 SMIC.

Il est donc possible d’attendre la publication du décret – dont nous vous informerons – pour procéder à la demande d’activité partielle.

Catégories
Articles

Nouvelles précisions sur la mise en place du CSE

Article publié dans le magazine Direction[s] n° 184 de mars 2020
Disponible en téléchargement PDF à la fin de l’article et consultable sur le site internet de Direction[s].

À l’heure où la plupart des structures doivent avoir élu leur comité social et économique (CSE), les dispositions relatives à la nouvelle instance représentative du personnel ont été récemment précisées par la jurisprudence et par le ministère du Travail.

Depuis  le  1er janvier 2020, les entreprises ayant atteint le seuil de  11  salariés pendant 12 mois consécutifs doivent avoir mis en place le comité social et économique (CSE). Outre des précisions apportées par la Cour de cassation, le ministère a actualisé son « questions-réponses » le 16 janvier dernier. Sélection des apports les plus significatifs.

1. Absence de CSE

  • Procès-verbal de carence en cours au 1er janvier 2020

Le Ministère précise que si un procès-verbal (PV) de carence aux élections des délégués du personnel et du comité d’entreprise a été établi avant le 22 septembre 2017, il continue à produire ses effets pour la durée des mandats de l’élection à laquelle il se rap- porte. Dès lors, la structure n’a pas à organiser de nouvelles élections avant cette échéance même si celle-ci est postérieure au 1er janvier 2020. Néanmoins, si une organisation syndicale ou un salarié de la structure concernée le demande, l’employeur devra engager le processus électoral dans le mois qui suit cette requête.

  • Carence de candidats aux élections

L’administration confirme que dans les entreprises dont l’effectif est compris entre 11 et 20 salariés, si aucun d’eux ne se porte candidat dans les 30 jours suivant la diffusion de l’information par l’employeur de l’organisation prochaine des élections, ce dernier est dispensé d’inviter les syndicats à négocier le protocole d’accord préélectoral. Il établit alors un PV de carence et le processus électoral s’achève.

  • Absence irrégulière de CSE

En dehors de ce cas ou de pro-rogation des mandats à la suite de la saisine de la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte) ou du tribunal d’instance, le ministère rappelle que la seule absence d’installation d’un CSE au 31 décembre 2019 peut caractériser une entrave à sa mise en place,  infraction pénale punie d’un an d’emprison- nement et 7500 euros d’amende. Néanmoins, l’administration semble vouloir faire preuve de tolérance en indiquant que, dès les premières semaines de 2020, ses services déconcentrés se rapprocheront des employeurs qui l’auraient omis pour que soit engagé au plus vite le processus électoral. Et si ces demandes n’étaient pas suivies d’effet, alors l’employeur s’exposerait à un constat d’infraction par l’inspecteur du travail [1].

Attention toutefois, indépendamment du délit d’entrave, l’employeur risque qu’un salarié réclame l’allocation de dommages-intérêts devant le conseil de prud’hommes. Très récemment, la Cour de cassation a rappelé que l’employeur qui n’a pas accompli – bien qu’il y soit légalement tenu – les diligences nécessaires à l’installation d’institutions représentatives du personnel (IRP), sans qu’un PV de carence soit établi, commet une faute causant un préjudice aux salariés alors privés d’une possibilité de représentation et de défense de leurs intérêts [2].

Par ailleurs, l’absence de CSE a nécessairement des conséquences sur la vie de la structure, en particulier concernant les informations et consultations obligatoires qui ne pourront pas être menées. Par exemple, il ne sera pas possible de dénoncer un usage, un engagement unilatéral ou un accord collectif dès lors que, pour être opposable aux salariés, cette procédure doit avoir fait l’objet d’une information préalable aux IRP.

2. Représentants de proximité et syndical

  • Représentants de proximité

En principe, les représentants de proximité peuvent être institués par l’accord collectif d’entreprise fixant le nombre et le périmètre des établissements distincts. Une interrogation restait à éclaircir : en l’absence de clause en ce sens ou d’accord collectif, l’employeur peut-il les instituer unilatérale- ment ? Le ministère semble répondre par la négative en précisant que dans le cas où les établissements distincts ont été déterminés par décision unilatérale de l’employeur, seul un accord collectif majoritaire en cours de cycle pourra s’en charger. Les associations auront ainsi l’opportunité d’évaluer l’efficacité de l’architecture de la représentation du personnel retenue et, au besoin, pourront mettre en place ultérieurement des représentants de proximité pour corriger certaines carences.

  • Représentant syndical au CSE

La Cour de cassation rappelle qu’il est interdit de cumuler un mandat de membre élu du CSE, titulaire ou suppléant, et de représentant syndical au comité, un accord collectif ne pouvant déroger à cette règle. En tel cas, l’intéressé devra choisir entre ses mandats. À défaut, celui de représentant syndical est caduc [3].

Commission Santé, Sécurité et Conditions de Travail (CSSCT)

  • Composition

Selon le ministère, le représentant syndical au CSE ne peut être désigné au sein de la commission santé sécurité et conditions de travail (CSSCT) « dans la mesure où il n’est pas membre à part entière du CSE, disposant d’une voix consultative et non pas délibérative ». Cet argument est discutable puisque les élus suppléants ne disposent pas non plus d’une voix délibérative. En revanche, la loi vise les représentants du personnel, ce que n’est effectivement pas le représentant syndical. Rappelons que la composition comme les modalités de désigna- tion des membres de la CSSCT sont d’ordre public. Sur ce dernier point, la Cour de cassation a récemment précisé qu’un vote du CSE à la majorité des présents est nécessaire, que la CSSCT soit obligatoire ou conventionnelle [4].

  • Attributions

Légalement, la CSSCT se voit confier, « par délégation » du CSE, tout ou partie des attributions du comité relatives à la santé, à la sécurité et aux conditions de travail, à l’exception du recours à un expert et des attributions consultatives. Aussi, revient-il à l’accord d’entreprise déterminant le nombre et le périmètre des établissements distincts de fixer notamment les missions confiées à la CSSCT.

Une question restait toutefois en suspens : puisque la CSSCT n’est qu’une composante du CSE, ce dernier peut-il lui déléguer des tâches qui n’auraient pas été prévues par l’accord collectif ? Il semblerait que non selon le ministère qui indique que « c’est bien l’accord d’entreprise […] qui définit les attributions SSCT du CSE qui seront déléguées à la commission » [5]. Au vu de la variété des clauses contenues dans les accords collectifs qui, parfois, se contentent de rappeler les termes de l’article L2315-38 du Code du travail sans détailler ces attributions, la jurisprudence ne devrait pas manquer d’occasions pour se prononcer à ce sujet.

  • Fonctionnement

En principe, il revient également aux partenaires sociaux d’établir les modalités de fonctionnement de la commission, notamment le nombre d’heures de délégation dont bénéficient les membres. générale du travail (DGT), il est obligatoire de leur accorder un tel crédit d’heures spécifique afin d’être en mesure d’exercer leurs fonctions [6].

Par ailleurs, la DGT indique que les modalités non précisées par accord collectif pourraient être déterminées par accord entre l’employeur et le CSE ou par le règlement intérieur du comité [7]. Rappelons toutefois que ce dernier ne peut comporter pour l’employeur, sans son accord, d’obligations qui ne résulteraient pas de dispositions légales. Le cas échéant, cet accord constitue un engagement unilatéral que l’employeur peut dénoncer à l’issue d’un délai raisonnable et après en avoir informé les membres de la délégation du personnel du CSE.

  • Formation

Ces derniers doivent bénéficier de la formation nécessaire à l’exercice de leurs missions en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail. Toutefois, la loi dispose que cette formation « des membres » de la CSSCT est d’une durée de trois ou cinq jours selon que l’entreprise compte plus ou moins de 300 salariés. L’administration en déduit que cette durée minimale est réservée aux seuls membres de la commission, tout en encourageant une durée équivalente pour les autres membres du CSE. Mais une autre interprétation pourrait être retenue par un juge dès lors qu’est visé l’article L2315-18 du Code du travail,  relatif  à la formation SSCT dispensée à l’ensemble des membres du CSE. La prudence appelle donc à allouer le même temps de formation à tous les élus, membres ou non de la CSSCT.

Cécile Noël,

Juriste, Picard avocats

[1] CSE: Quelles conséquences en cas d’absence de mise en place?, à consul- ter  sur   https://travail-emploi.gouv.fr
[2] Cass. soc., 8 janv. 2020, n° 18-20.591
[3] Cass. soc., 22 janv. 2020, n° 19-13.269
[4] Cass.  soc.,  27  nov.  2019,  n° 19-14.224
[5] Foire aux questions diffusée par la DGT aux avocats, Q. n° 31
[6] F.A.Q. diffusée aux avocats, Q. n° 32
[7] F.A.Q. diffusée aux avocats, Q. n° 30

RÉFÉRENCES

« Comité social et économique : 117 questions-réponses », à consulter sur https://travail-emploi.gouv.fr
Code du travail, articles L2314-8, L2314-5 al. 5, L2317-1, L2313-7, L2315-38, L2315-41, 2°, L2315-41, L2315-24, L2315-18, L2315-40

Catégories
Articles

Loi PACTE : une refonte complète des seuils d’effectifs ?

Article publié dans le magazine Direction[s] n° 183 de février 2020

La loi du 22 mai 2019, dite Pacte, entend procéder à une simplification et une rationalisation des seuils d’effectifs dans les entreprises qui, lors de leur dépassement, soumettent les employeurs à de nouvelles obligations. Néanmoins, certains particularismes demeurent.

Partant du principe que les entreprises étaient plutôt réticentes à franchir les seuils d’effectifs, le législateur a souhaité assouplir les dispositions légales afin de limiter les effets néfastes communément appelés « effets de seuil ». C’est l’article 11 de la loi pour la croissance et la trans- formation des entreprises du 22 mai 2019, dite loi Pacte, qui a eu cette lourde tâche. Ses dispositions sont entrées en vigueur au 1er janvier 2020, à la suite de la publication de plusieurs décrets d’application du 31 décembre 2019. Cette simplification découle des trois modifications principales suivantes.

1. Une modalité unique de décompte

Jusqu’au 31 décembre 2019, les paramètres à prendre en compte pour calculer les effectifs étaient disparates, selon l’avantage considéré (effectif moyen annuel sur N-1 ou N-2, au 31 décembre de l’année N-1…), le statut particulier de certains salariés (intérimaires, apprentis, temps partiels, CDD, embauches en cours d’année…) ou encore le périmètre (entreprise, établissement, unité économique et sociale – UES…).

Depuis le 1er janvier 2020, une règle de calcul unique issue du droit de la Sécurité sociale consacrée à l’article L130-1 s’applique. Pour apprécier les seuils, est désormais comptabilisé l’effectif salarié annuel moyen, y compris s’il s’agit d’une association comportant plusieurs établissements. Les conséquences sont les suivantes :

• l’effectif à prendre en compte doit être apprécié au niveau de l’entreprise (abstraction faite de l’établissement ou de l’UES) ;

• l’effectif est relevé au 31 décembre de l’année N-1 en fonction de la moyenne du nombre de personnes qu’il conviendra d’inclure dans le calcul au titre de chacun des mois de l’année N-1.

Schématiquement, cette mesure devrait éviter à de nombreux services des ressources humaines de ressortir leur tableau Excel et de prendre appui – avec toute l’automaticité qui en découle – sur la déclaration sociale nominative (DSN). La prudence est toutefois de mise puisque des spécificités demeurent.

Pour calculer l’effectif, il conviendra classiquement de se référer aux catégories de personnes visées par l’article R130-1 du Code de la Sécurité sociale, remanié par le décret n° 2019- 1586 du 31 décembre 2019. Ainsi le texte exclut les mandataires sociaux sans contrat de travail (lesquels étaient, selon l’ancienne rédaction, inclus du fait de leur affiliation au régime général de la Sécurité sociale). Il sera néanmoins nécessaire de veiller à certaines particularités selon l’objet de l’obligation puisque les dispositions du Code du travail [1] demeurent applicables. En effet, il existe toujours des différences concernant le mode de décompte des intérimaires et salariés mis à disposition. Ceux-ci sont pris en compte dans l’entreprise utilisatrice s’ils sont présents depuis au moins un an. Tel n’est pas le cas en droit de la Sécurité sociale.

2. Une concentration des seuils

« Inférieur ou égal à onze salariés », « vingt salariés au plus », « plus de vingt-cinq salariés », « au moins de cent cinquante salariés » : difficile de recenser toutes les rédactions qui étaient applicables jusqu’à présent dans les différents codes. Néanmoins, et c’est l’une des principales modifications, les seuils intermédiaires de 10, 20, 25, 100, 150 et 200 salariés ont disparu.

Depuis le 1er janvier 2020, les seuils d’effectifs se concentrent autour de trois paliers distincts: 11, 50 et 250 salariés. En pratique, cela implique que certaines obligations actuelles prévues, par exemple, au seuil de 20 salariés soient déplacées et non supprimées. La loi Pacte va ainsi dans le sens d’un rehaussement des seuils d’effectifs. De ce fait, l’obligation de mettre en place un règlement intérieur n’est désormais obligatoire qu’à partir de 50 salariés, au lieu de 20 et, particularité à signaler, dès lors que cet effectif aura été atteint pendant 12 mois consécutifs [2].

À noter. L’effectif reste décompté néanmoins selon les dispositions des articles L1111-2 et L1111-3 du Code du travail. Il est important de souligner que le seuil déterminant le taux de la contribution Fnal (pour fonds national d’aide au logement) à 0,5 % (au lieu de 0,1 %) ne sera dû qu’à partir de 50 salariés et non 20 comme auparavant. Toutefois, le texte prévoit un mécanisme d’atténuation des effets de franchisse- ment de seuil qui ne s’applique qu’aux entreprises qui, au 1er janvier 2020, n’ont pas atteint le seuil requis ou encore à celles créées après cette date et pour lesquelles il faudra attendre l’écoulement du délai de cinq années.

À titre d’exemple, les associations qui emploient 30 salariés au 1er janvier 2020 et qui étaient assujetties au taux de contribution de 0,50 % en 2019 le restent. L’Urssaf s’est limitée à rappeler ce principe sur son site Internet. Des précisions de la part de l’organisme, par la voie d’une circulaire opposable, sont fortement attendues.

Même si la loi Pacte a le mérite de rechercher l’harmonisation et la clarification, il n’en demeure pas moins que certains particularismes vont demeurer. En effet, les seuils de 20 et 200 salariés ne sont pas définitivement supprimés. Ainsi, celui de 200 salariés obligeant les entreprises à mettre à disposition un local syndical a été maintenu.

3. Limiter les effets de franchissement des seuils

Enfin, la loi tente de résoudre une des principales difficultés qui est celle des effets de seuils. Concrètement, cela revient à dire que les associations ou entreprises stagnent plus ou moins volontairement en deçà d’un seuil pour éviter de mettre en œuvre l’obligation qui en découle. Il peut être cité, à titre d’exemple, l’obligation d’employer 6 % de travailleurs handicapés une fois que le seuil de 20 salariés est atteint pendant une durée de trois ans.

Depuis le 1er janvier 2020, le seuil devra être franchi pendant cinq années civiles consécutives pour produire ses effets. Autrement dit, il faudra attendre cinq ans pour que le dépassement du seuil devienne contraignant et, dès lors que l’effectif passera sous le seuil franchi jusqu’alors, un délai de cinq ans recommencera à courir intégralement. Précisons toutefois que, pour ouvrir cette nouvelle période, il sera nécessaire d’être passé en dessous du seuil en moyenne sur une année civile. Cependant, un mécanisme d’atténuation des effets de franchissement a été institué par le Code de la sécurité sociale.

Des nouveaux seuils partout, tout le temps ?

Aux prémices de la loi Pacte, nombreux sont ceux qui se sont interrogés sur l’application de ces nouvelles règles en matière de représentation du personnel. Le délai de cinq années civiles consécutives aurait-il pu être applicable en cas de mise en place d’un comité social et économique (CSE) ? Beaucoup craignaient, en toute logique, un délitement de la représentation du personnel. La réponse est non. En effet, le texte législatif n’a pas retouché les seuils d’effectifs issus de la réforme du Code du travail. Ainsi, la mise en place d’un CSE n’est obligatoire que « si l’effectif d’au moins onze salariés est  atteint pendant douze mois consécutifs ». Aussi, malgré une clarification, les employeurs devront encore surfer entre les dispositions du Code de la Sécurité sociale et celles du Code du travail tant il existe ici et là des particularités.

François Legras,
Avocat, Picard avocats

[1] Code du travail, articles L1111-2 et L1111-3
[2] Code du travail, article L1311-2, applicable aux entreprises créées depuis le 1er janvier 2020

RÉFÉRENCES
● Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (Pacte)
● Décrets n° 2019-1591 et n° 2019- 1586 du 31 décembre 2019

Catégories
Infographies

Les règles de suppléance du CSE

Un élu du CSE est absent, qui doit le remplacer ? Contrairement à certaines idées reçues, un titulaire n’a pas de suppléant attitré, pas plus qu’il n’a le choix de son suppléant… Les règles sont strictement fixées par le Code du travail ! Explications ↓

Catégories
Infographies

Infographie : grève nationale et interprofessionnelle

Catégories
Articles

RGPD : les représentants du personnel concernés

Article publié dans le magazine Direction[s] n° 181 de décembre 2019.
Disponible en téléchargement PDF à la fin de l’article et consultable sur le site internet de Direction[s].

Le règlement général sur la protection des données (RGPD) représente encore un important chantier pour le secteur qui doit se mettre en conformité. Y compris le comité social et économique (CSE). L’occasion de faire le point sur les obligations de ce dernier en la matière.

À l’instar de l’entreprise ou de l’association, le CSE collecte des données personnelles et met en œuvre certains traitements dans le cadre de ses missions, notamment pour la gestion des activités sociales et culturelles (ASC). À ce titre, il est un responsable de traitement [1] soumis à l’ensemble des obligations posées par le règlement général sur la protection des données (RGPD).

Les grands principes

En premier lieu, le CSE doit être en mesure d’assurer les cinq grands principes indispensables à cette protection.

Finalité. Il n’est possible de conserver et d’utiliser les données concernant une personne physique que dans un but précis, légal et légitime. Les ASC en font partie.

Proportionnalité et pertinence. Les données collectées collectées doivent être strictement nécessaires au regard de la finalité poursuivie.

Durée de conservation. Aucune donnée ne doit être gardée indéfiniment, ce qui suppose de fixer une durée maximale à l’avance et de procéder à la suppression le moment venu. Pour les ASC, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) recommande une durée de deux ans à compter de l’exécution de la prestation pour certaines données.

Sécurité et confidentialité. L’accès aux données détenues par le CSE doit être limité à certaines personnes autorisées (secrétaire, trésorier…). Le comité est le garant des données dont il dispose et en assume la responsabilité, notamment en mettant en place les dispositifs techniques et organisationnels appropriés (accès aux serveurs, mots de passe, etc.). En cas de violation, il doit en informer la Cnil.

Respect du droit des personnes. Ce grand principe comprend le droit d’accès, de rectification, d’effacement et d’opposition.

Désigner un délégué ad hoc ?

Eu égard à sa taille, à la nature et au nombre de données personnelles traitées, le CSE est dispensé dans la plupart des cas de mettre en place un délégué à la protection des données (DPD) [2]. En effet, l’obligation vise principale-ment les traitements à grande échelle de données sensibles [3]. Néanmoins, la Cnil recommande vivement à tous les responsables de traitement de le faire. A mini-ma, le CSE pourrait se doter d’un « correspondant » ou « référent » RGPD qui aura pour mission d’informer, de conseiller et de contrôler le respect du règlement pour le compte du comité. Cette fonction peut être assurée par un membre de l’instance.

Caractère facultatif du registre de traitement

De la même façon, les comités comptant moins de 250 salariés bénéficient d’une dérogation concernant l’obligation de tenir un registre de traitement, à l’exception des traitements non occasionnels, susceptibles de comporter un risque pour les droits et libertés des personnes ou portant sur des don-nées sensibles [4]. Or, celles recueil-lies, par exemple dans le cadre des ASC ou d’une procédure d’inaptitude (identité, adresse, situation familiale, santé, etc.), ne sont a priori pas touchées par cette restriction, même si nous manquons encore de recul sur la position de la Cnil en la matière.
Information et consentement des salariés

Pour être en conformité, le CSE doit s’assurer que les salariés ont eu connaissance de leurs droits en leur communiquant certaines informations [5] (identité du responsable de traitement, finalité, destinataires des données, durée de conservation, etc.), dont la liste diffère selon que les don-nées sont collectées directe-ment [6] auprès de la personne ou indirectement [7] par l’intermédiaire d’un tiers (en l’occurrence l’employeur).

Le comité est néanmoins dis-pensé d’accomplir ces formalités quand la personne dispose déjà de ces informations, ce qui sera souvent le cas lorsqu’elles sont fournies par l’employeur. Dans cette hypothèse, le CSE devra préciser au service des ressources humaines (RH) les traitements qui seront effectués.

Le moment de cette communication n’est pas non plus identique selon que la collecte est directe ou indirecte [8], étant précisé que l’instance dispose d’une grande liberté de choix concernant le support utilisé, sous réserve que l’information soit compréhensible, concise et aisé-ment accessible [9].
Pour être autorisé à mettre en œuvre un traitement, le règle-ment prévoit plusieurs bases légales dont le consentement de la personne concernée. Celui-ci n’est toutefois pas requis lorsque le traitement « est nécessaire au respect d’une obligation légale » à laquelle est soumis le responsable [10].

Par exemple, le traitement effectué dans le cadre d’information-consultation sur le licencie-ment d’un salarié protégé pourrait être justifié par les obligations issues du Code du travail. À l’inverse, pour les ASC, le CSE devra obtenir l’autorisation du personnel, en particulier lorsque la collecte de données est réalisée directement auprès de ce dernier.

Attention aux données traitées par des tiers

Dans le cadre de ses missions, le CSE est souvent amené à confier certaines données personnelles à des sous-traitants (expert-comptable, voyagiste, résidence de vacances, autre presta-taire de services). En qualité de coresponsable, il appartient au comité de s’assurer que ces tiers présentent des garanties suffisantes à propos du traitement mis en œuvre et qu’ils sont en conformité. En pratique, cette vérification s’opère lors de la conclusion du contrat ou de la lettre de mission liant le CSE au fournisseur, par l’ajout d’une clause spécifique relative à la protection des données.

Contrôle et mise en conformité

Tout comme l’employeur, le comité est susceptible de faire l’objet de contrôles. Il conviendra donc de recenser les traitements déjà mis en œuvre et de prendre les mesures nécessaires pour en garantir la conformité. Il ne peut qu’être conseillé aux membres de l’instance de se former sur ces questions, et/ou de se faire accompagner par un professionnel. À noter que la Cnil vient de mettre en ligne un Mooc [11] pour s’initier au RGPD, qui constitue un premier support d’information intéressant pour les élus du CSE, disponible jusqu’en septembre 2021.

Le CSE peut aussi être contrôleur

Au-delà de sa qualité de responsable de traitement, le comité veille également, pour le compte des salariés, à ce que l’entreprise ou l’association soit en conformité avec le RGPD (mise en place d’un registre des traitements, désignation d’un délégué, dispositif garantissant la sécurité et la confidentialité des données, information des salariés, etc.). Dans les entreprises de 50 salariés et plus soumises aux consultations récurrentes obligatoires, il est possible de se saisir de la thématique de la protection des données personnelles via l’accord aménageant notamment le contenu, et la périodicité des consultations [Code du travail, article L2312-19]. Le CSE doit aussi s’en préoccuper dans le cadre des consultations sur des sujets ponctuels relatifs à la marche générale de l’entreprise (mise en place d’un système de badgeage, de vidéosurveillance…) [Code du travail, article L2312-8].

Steven Theallier,
Avocat, Picard avocats

[1] RGPD, article 4, point 7 (à consulter sur le site de la Cnil)
[2] Lire Direction[s] n° 170, p. 37
[3] RGPD, article 37
[4] RGPD, article 30
[5] RGPD, article 48
[6] RGPD, article 13
[7] RGPD, article 14
[8] RGPD, article 13
[9] RGPD, article 12
[10] RGPD, article 6
[11] « L’atelier RGPD », à retrouver sur https://atelier-rgpd.cnil.fr

Références :
Règlement européen n° 2016/679 du 27 avril 2016 et loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles

Catégories
Articles

Contrôle Urssaf : comment le prévenir ou le guérir

Article publié dans le magazine Direction[s] n° 178 de septembre 2019

L’annonce d’un contrôle Urssaf génère de l’appréhension chez les employeurs. Si ceux du secteur social et médico-social disposent d’un atout lié à leur objet social, ils ne sont pas épargnés.

La vigilance s’impose donc dans l’application de la législation en matière de Sécurité sociale.

Un contrôle de l’Union de recouvrement des cotisations de Sécurité sociale et d’allocations familiale (Urssaf) peut intervenir tout moment. En pratique toutefois, pour tenir compte du délai de prescription en vigueur, il n’est pas engagé moins de trois ans après le précédent.

1. Anticiper un contrôle

En dépit de cet intervalle, il est recommandé d’entamer les mesures rectificatives dès la fin du contrôle. En effet, il est bien rare que l’inaction, qui peut être justifiée par l’erreur ou par les modifications récentes de la législation en matière de Sécurité sociale, constitue la solution à retenir tant le redressement peut s’avérer coûteux.

À noter. À titre expérimental et pour une durée de quatre ans, la loi du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance (Essoc) prévoit, dans les régions Hauts-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes, une légère augmentation du délai entre deux visites de l’administration pour les entreprises de moins de 250 salariés et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 millions d’euros [1]. Sauf s’il existe des indices précis et concordants de manquement à une obligation légale ou réglementaire.

La mise en conformité

Mieux vaut anticiper un contrôle. La mise en conformité peut prendre différentes tournures. Lorsqu’elle résulte d’observations déjà notifiées précédemment par l’Urssaf, il suffit généralement pour l’organisation d’apporter les mesures correctives sur son logiciel de paie ou bien de prendre les actes nécessaires en vue de la sécurisation d’un dispositif. Par exemple, il est fréquent que l’union de recouvrement notifie des redressements à des associations gestionnaires du secteur qui n’ont pas remis la décision unilatérale mettant en place un régime « frais de santé » à l’ensemble des salariés contre récépissé. Si l’employeur n’a jamais subi le moindre contrôle Urssaf sur lequel s’appuyer, il est important qu’il procède à la vérification de sa pratique actuelle. Parmi les principaux motifs de redressement à examiner avec l’aide d’un expert-comptable ou d’un avocat ? Comme l’indique l’Urssaf, il s’agit du traitement des avantages en nature, de la réduction générale des cotisations sociales, des indemnités de rupture non soumises à cotisations ou encore l’irrespect du formalisme des dispositifs de prévoyance/frais de santé.

User des droits nouveaux ouverts aux cotisants ?

En cas de doute sur une pratique existante ou à venir, l’employeur pourra rechercher à valider celle-ci par le biais du rescrit social permettant d’obtenir une décision explicite de l’Urssaf qui lui sera opposable lors des prochains contrôles [2]. Nouveauté introduite par la loi Essoc ? La possibilité pour l’employeur de demander à faire l’objet d’un contrôle sur des points de la législation de Sécurité sociale qu’il aura lui-même identifiés au préalable [3]. L’utilité de ce contrôle « choisi » apparaît toutefois discutable puisqu’il conduirait, à l’instar du rescrit social, à faire valider (ou redresser) une pratique existante. En réalité, ce dispositif devrait simplement permettre à l’employeur contrôlé de faire valoir, de manière indiscutable, sa bonne foi afin qu’il puisse obtenir des remises de majorations et pénalités.

En cas de doute sur une pratique, l’employeur pourra la faire valider par le biais du rescrit social pour obtenir une décision explicite de l’Urssaf.

2. Réagir en cas de contrôle

La phase de contrôle tant redoutée débute par la réception d’un avis, que l’Urssaf doit envoyer au moins 15 jours avant sa visite [4].

L’avis de contrôle et son déroulement

Par principe, le contrôle est effectué dans les locaux de l’organisation.

Il est donc impératif de tout mettre en oeuvre pour que tout se passe dans de bonnes conditions. Ne serait-il pas utile, par exemple, de faire visiter l’association pour que le contrôleur puisse s’imprégner de son modèle social ? Il est évident que ce dernier se montrera moins sévère avec un employeur qui a su l’accueillir à bras ouverts plutôt que celui qui s’opposera à toutes ses demandes, au risque qui plus est d’être accusé de faire obstacle au contrôle [5].

À noter. Le contrôleur Urssaf est l’interlocuteur « unique » le temps du contrôle [6]. C’est donc lui qui décide de notifier un redressement ou non, de supprimer un chef de redressement après avoir pris connaissance des réponses écrites ou non.

La lettre d’observations

À la suite des opérations de contrôle (qui sont plus ou moins longues selon la taille de l’organisation), l’Urssaf doit envoyer une lettre d’observations. Elle reprend :

l’objet du contrôle ;
les documents consultés ;
la période vérifiée ;
la date de fin de contrôle ;
les observations faites au cours de celui-ci.

Les observations prennent deux formes :

le plus souvent, il s’agit du redressement ;
parfois d’une observation pour l’avenir visant à ce que l’association se mette en conformité.

Ce document marque le début de la phase de redressement. Quand bien même il ne s’agirait que d’observations pour l’avenir, il est important d’y apporter une vigilance particulière dès lors que celle-ci pourrait reposer sur une interprétation erronée de l’Urssaf qui s’imposerait lors d’une prochaine visite, voire qui pourrait conduire inutilement à une « mise en conformité ».

Lors de la réception de la lettre d’observations, l’employeur doit donc prendre attache avec son conseil habituel qui pourra l’assister dans la rédaction d’une réponse et pour identifier, le cas échéant, les motifs d’annulation possibles. L’employeur dispose d’un délai de 30 jours pour répondre aux observations.

À noter. Ce délai peut, si l’organisation le sollicite, être prolongé de 30 jours, sauf en cas d’abus de droit ou de travail dissimulé. L’Urssaf a l’obligation de répondre aux observations formulées par l’employeur, quand bien même il déciderait de maintenir en totalité les chefs de redressement contestés, faute de quoi le redressement prononcé serait nul [7].

Même si le redressement est fondé, la législation offre des solutions à l’employeur pour réduire le montant exigé.

La mise en demeure et après

La mise en demeure constitue une invitation « impérative » adressée au débiteur de cotisations pour régulariser sa situation.

Elle concerne les cotisations visées dans la lettre d’observations (en cas d’écart entre les montants, une contestation pourrait être envisagée) et les majorations et pénalités de retard afférentes [8].

En effet, la mise en demeure doit préciser :

la cause ;
la nature ;
le montant des sommes réclamées ;
les majorations et pénalités qui s’y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent
le délai pour se libérer de la dette ;
l’identité et la qualité du signataire.

À réception de ce document, l’employeur doit vérifier que toutes les mentions obligatoires y figurent bien puisque, à défaut, l’annulation du redressement pourrait être envisagée.

Dans l’hypothèse où un recours serait nécessaire ou opportun, l’employeur doit saisir la commission de recours amiable de l’Urssaf dans un délai de deux mois. Nombreux sont ceux qui s’interrogent à ce moment-là sur la nécessité de payer le redressement. Il est généralement recommandé de payer dans un délai d’un mois, puisque le taux des majorations de retard complémentaires est, durant ce temps, abaissé [9]. Cela n’empêchera pas pour autant l’employeur de solliciter la remise gracieuse de ces majorations auprès de l’Urssaf selon un certain formalisme. Quand bien même le redressement serait fondé, la législation de la Sécurité sociale offre de multiples solutions à l’employeur pour tenter de diminuer, même un peu, le montant exigé par l’Urssaf. Certaines solutions pourront également se trouver dans le cadre d’une action contentieuse.

Échapper à une sanction grâce au droit à l’erreur

La loi pour un État au service d’une société de confiance a inséré dans le Code des relations entre le public et l’administration un article (L123-1) instaurant un « droit à l’erreur ». Ce droit nouveau devrait ouvrir des opportunités particulièrement intéressantes pour les employeurs du secteur social et médico-social de bonne foi. Ainsi, un cotisant qui méconnaîtrait pour la première fois une règle applicable à sa situation ou ayant commis une erreur matérielle, peut échapper aux sanctions pécuniaires. Les juges pourraient également avoir à se prononcer sur le périmètre exact du droit à l’erreur dans le cadre d’un redressement.

François Legras,
avocat, Picard avocats

[1] Décret n° 2018-1019 du 21 novembre 2018
[2] Code de la Sécurité sociale (CSS), article L243-6-3
[3] Code des relations entre le public et les administrations (CRPA), art. L124-1
[4] CSS, art. R243-59-1
[5] CSS, art. R243-59-4-1
[6] CSS, art. R243-59
[7] Cour de cass. 2e ch. civ., 12 juillet 2018, n° 17-18.730
[8] CSS, art. L244-2
[9] CSS, art. R243-18 et suiv.

Catégories
Infographies

Infographie : l’index de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes

Infographie : L’index de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes
Catégories
Articles

Absence prolongée : les risques d’un licenciement

Article publié dans le magazine Direction[s] n° 177 de juillet-août 2019

Pour constituer un motif valable de licenciement notifié, l’absence prolongée (ou répétée) doit répondre à de nombreuses conditions. Lesquelles sont bien souvent ignorées par les employeurs, qui se trouvent alors exposés à un risque considérable.

Un licenciement ne peut en aucun cas être fondé sur l’état de santé d’un salarié, en vertu du principe de non-discrimination consacré par le Code du travail. Néanmoins, la jurisprudence permet aux employeurs de licencier, non pas en raison de la maladie, mais de la situation objective de l’entreprise qui se trouve dans la nécessité de pourvoir au remplacement définitif d’un salarié dont l’absence prolongée, ou répétée, perturbe son activité. La Cour de cassation a rappelé ainsi que « la lettre de licenciement doit énoncer expressément la perturbation dans le fonctionnement de l’entreprise et la nécessité de pourvoir au remplacement du salarié absent, dont le caractère définitif doit être vérifié par les juges du fond » [1].

Appréciation de la perturbation de l’entreprise

La difficulté majeure de recourir à ce motif de licenciement réside sans doute dans la nécessité pour les employeurs de justifier de la réalité de la désorganisation de toute l’entreprise, et non uniquement d’un service ou d’un département. Toutefois, une décision isolée a admis que la perturbation d’un service essentiel de l’entreprise pouvait le justifier [2]. Pour apprécier la réalité de cette situation, les juges retiennent plusieurs critères, notamment.

  • le lien de causalité entre l’absence et les perturbations rencontrées (exemple : retard dans l’exécution d’une prestation) ;
  • la qualification de l’emploi du salarié absent (exemple : un professionnel ayant une qualification peu élevée peut être remplacé plus facilement par des salariés en CDD ou des intérimaires) ;
  • la taille de l’entreprise (exemple : la perturbation est d’autant plus importante lorsque l’association est petite) ;
  •  la nature de l’activité (exemple :
  • assurer la continuité des soins) ;
  • la situation géographique (exemple : bassin d’emploi).

Nécessité d’un remplacement définitif

La condition tenant à la nécessité d’un remplacement définitif n’est pas remplie si des solutions temporaires sont possibles, en interne ou en externe, et que ces dernières peuvent être pérennisées en cas de prolongation de l’absence du salarié. Par ailleurs, la personne qui remplacera définitivement le professionnel absent doit nécessairement être embauchée en contrat à durée indéterminée – CDI (nouvelle embauche) [3], la jurisprudence autorisant néanmoins le remplacement en cascade (le salarié licencié sera remplacé par un salarié de l’association, qui lui-même sera remplacé par lesalarié nouvellement recruté) [4]. En tout état de cause, la nouvelle embauche doit se faire sur une durée du travail similaire à celle du contrat rompu [5].

Enfin, l’embauche du remplaçant doit intervenir à une époque proche du licenciement du salarié absent, avant ou après, mais dans un délai raisonnable (deux mois maximums selon plusieurs jurisprudences [6]).

L’employeur doit justifier de la désorganisation de toute l’entreprise, et non uniquement d’un service ou d’un département.

En cas de contentieux

Faute de prouver que ces conditions sont réunies, l’employeur s’expose au risque que le licenciement soit jugé comme dépourvu de cause réelle et sérieuse, ou qu’il soit annulé en raison de son caractère discriminatoire car fondé sur l’état de santé. Le recours à ce motif est également prohibé lorsque l’absence résulte du harcèlement moral ou sexuel subi par le salarié, la nullité de la rupture étant alors encourue [7].

D’apparence très accessible et adapté lorsqu’un employeur fait face à l’absence prolongée d’un salarié, ce motif de licenciement ne devra donc être mis en œuvre qu’après une étude approfondie sur la cause de l’absence, la perturbation occasionnée, et la nécessité du remplacement.

Gare aux clauses de garantie d’emploi !

Certaines conventions collectives nationales (CCN) comportent des clauses qui interdisent à l’employeur de licencier un salarié malade pendant une période donnée : ce sont les clauses dites de « garantie d’emploi » qui, en cas de violation, rendent le licenciement sans cause réelle et sérieuse. En l’occurrence, la CCN du 15 mars 1966 prévoit à son article 26 que l’employeur ne peut licencier le salarié pendant les six premiers mois de son absence pour raison de maladie. Il convient donc d’être particulièrement vigilant. Un accord collectif d’entreprise, en application de la nouvelle hiérarchie des normes, pourrait venir modifier ce délai, le moduler selon les caractéristiques du poste et même purement et simplement le supprimer.

Steven Theallier,
Picard avocats

1] Cass. soc., 26 juin 2018, n° 15-28.838
[2] Cass, soc., 2 déc. 2009, n° 08-43.486, Cass. soc., 23 mai 2017, n° 14-11.929
[3] Cass. soc., 26 sept. 2007, n° 06-43.029
[4] Cass. soc., 26 janv. 2011, n° 09-71.907
[5] Cass. soc., 6 fév. 2008, n° 06-44.389
[6] Cass. soc., 11 juillet 2012, n° 11-16.370, Cass. soc., 19 déc. 2007, n° 06-45.301
[7] Cass. soc., 30 janv. 2019, n° 17-31.473

Catégories
Articles

Dénoncer un usage ou un engagement unilatéral

Article publié dans le magazine Direction[s] n° 173 de mars 2019

Avantages consentis par l’employeur aux salariés, l’usage comme l’engagement unilatéral peuvent être remis en cause. Une décision qui doit être motivée et qui répond à plusieurs conditions. Rappel.

En application de la hiérarchie des normes et du principe de faveur, un usage ou un engagement unilatéral [1] sont nécessairement plus favorables aux salariés : ils ne peuvent déroger, dans un sens moins avantageux, à un texte d’un rang supérieur (accord col-lectif, convention collective, Code du travail).

Caractéristiques

La définition de l’usage n’a pas varié depuis plusieurs décennies : cette pratique – non écrite – doit revêtir les caractéristiques suivantes : constance, généralité et fixité. Celles-ci sont cumulatives et devront être démontrées par un salarié en revendiquant l’existence à son profit. L’erreur n’étant pas créatrice de droit, elle n’est pas plus créatrice d’usage. Il peut concerner un groupe homogène de salariés objectivement identifiable, sans obligatoirement toucher l’ensemble des salariés.

L’engagement unilatéral ne répond pas à une définition aussi précise. Toutefois, il doit nécessairement être écrit et, comme l’usage, concerner une catégorie homogène de salariés identifiable. Il implique évidemment un acte « positif » de l’employeur. Et à la différence de l’usage, il peut être à durée déterminée ou indéterminée. Dans le premier cas, il ne pourra pas être dénoncé.

À noter. Pour les associations sou-mises à l’article L314-6 du Code de l’action sociale et des familles (CASF), l’agrément de ces pratiques est une condition de leur opposabilité à l’employeur [2]. La position de la Cour de cassation pourrait être amenée à évoluer pour les structures sous contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM), puisque depuis la loi de finance-ment de la Sécurité sociale pour 2018, l’agrément des accords collectifs n’est plus nécessaire, de sorte que celui des usages et engagements unilatéraux devrait être désormais sans objet.

Une modification possible ?

La Cour de cassation répond invariablement par la négative. Pour l’usage, le critère de constance s’oppose évidemment à toute variation ou modification de ce principe. Aussi, pour éviter la création d’un usage, mieux vaut en modifier le plus rapidement possible le contenu. La jurisprudence refuse également, en dehors de toute dénonciation régulière, la possibilité de modifier un l’engagement unilatéral, quelle que soit sa nature.

La fin de la pratique

Cette dénonciation, qui n’a pas à être motivée, répond à des prin-cipes simples :

  • Une information des instances représentatives du personnel ;
  • Une information individuelle des salariés ;
  • Le respect d’un délai de prévenance suffisant.

L’information (et non la consultation) doit concerner l’ensemble des IRP : comité d’entreprise (CE), d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), délégués du personnel (DP) et aujourd’hui le comité social et économique (CSE). Si l’usage ou l’engagement concerne l’ensemble de l’organisa-tion, une information du comité central d’entreprise (CCE) ou du CSE central sera également requise. Mais si la dénonciation a des conséquences sur la marche générale de l’association ou sur les conditions de travail des salariés, une information consultation du CE et du CHSCT (ou du CSE) devra être réalisée.

À noter. Si la jurisprudence vise les IRP, il conviendrait d’informer les éventuels délégués syndicaux, ceux-ci ayant vocation à négocier un accord de substitution.

S’agissant de l’information individuelle des salariés, elle doit s’adresser à ceux bénéficiant de l’usage, mais aussi à ceux susceptibles de pouvoir en bénéficier. L’employeur doit impérativement se ménager la preuve de cette information, qui doit être à date certaine.

Le délai de prévenance ne répond à aucune règle et dépendra de la nature de la pratique dénoncée. La dénonciation ne peut pas avoir d’effet rétroactif : elle ne peut jouer que pour l’avenir. Un délai compris entre deux et trois mois est globalement jugé suffisant.

Enfin, l’accord collectif d’entre-prise, même moins favorable, peut être une source de remise en cause de ces pratiques, dès lors qu’il porte sur le même thème. Enfin, en cas de fusion entraînant le transfert de salariés, celles-ci ne sont pas incriminées : elles sont transférées au nouvel employeur, qui ne pourra s’en délier qu’en les dénonçant.

Le cas de l’opposition

Lorsque la procédure de dénonciation a été respectée, la fin de l’usage ou de l’engagement unilatéral est opposable aux salariés. Ainsi, en cas de dénonciation régulière d’un usage qui attribuait une prime, bien que portant sur un élément de la rémunération, le professionnel ne pourra plus s’en prévaloir. Évidemment, il convient de réserver l’hypothèse d’une contractualisation de ces pratiques.

À l’heure où la négociation collective a la part belle des réformes, l’usage et l’engagement unilatéral de l’employeur ont encore de beaux jours devant eux, y compris dans l’esprit du législateur. La « prime exceptionnelle de pouvoir d’achat » pouvait ainsi être instaurée jusqu’au 31 janvier par décision unilatérale de l’employeur [3].

L’application d’une convention collective via cette pratique

Les principales conventions collectives nationales (CCN) du secteur n’étant pas étendues (hors l’aide à domicile), l’application d’une CCN résulte soit d’une adhésion à une organisation syndicale signataire, soit d’une application volontaire. Cette dernière procédure peut résulter d’un usage ou d’un engagement unilatéral de l’employeur. Ici encore, la dénonciation régulière sera pleinement opposable aux salariés, sans faculté d’opposition.

Cécile Noël
Juriste, Picard avocats

Références :
[1] Également appelé décision unilatérale
[2] Cass. soc., 28 novembre 2018, n° 17-17.968
[3] Loi n° 2018-1213 du 24 déc. 2018