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La gestion d’un temps partiel thérapeutique

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Article publié dans le magazine Direction[s] n° 159 de décembre 2017

Le temps partiel thérapeutique permet à un salarié de reprendre son travail après un arrêt avec des horaires aménagés. Ce qui implique des formalités pour l’employeur, ainsi que certaines précautions, notamment en matière d’indemnités et de contrat.

Le temps partiel thérapeu­tique (qui n’est pas néces­sairement un mi-temps) permet à un salarié de reprendre progressivement le tra­vail par le biais d’un temps partiel.

1. Qui peut en bénéficier et comment ?

Tous les salariés ayant fait l’objet d’un arrêt de travail indemnisé à temps complet peuvent se voir prescrire une reprise à temps partiel par leur médecin traitant et bénéficier au titre du temps non tra­vaillé des indemnités journalières de Sécurité sociale (IJSS). La percep­tion d’IJSS suppose en principe que la reprise à temps partiel fasse immédiatement suite à l’arrêt de tra­vail indemnisé à temps complet [1]. Cette condition ne s’applique cependant pas aux personnes atteintes d’affections de longue durée ou victimes d’un accident du travail ou d’une maladie profession­nelle, dès lors que l’impossibilité de poursuivre l’activité à temps com­plet résulte de cette affection [2]. À noter. L’employeur ne peut pas prendre l’initiative d’une telle modalité.

Si le Code du travail ne prévoit pas de durée maximale de mise en oeuvre du temps partiel thérapeu­tique pour un même salarié, celle-ci est, en pratique, fonction de la durée maximale de versement des IJSS sur les heures non travaillées. Laquelle ne peut dépasser de plus de 12 mois la limite maximale classique de perception des IJSS en cas d’arrêt maladie (trois ans en cas d’affection de longue durée ; 360 IJSS sur une période de trois ans dans les autres cas).

Concrètement, le salarié trans­met les volets 1 et 2 de la prescrip­tion de son médecin traitant à la caisse primaire d’assurance mala­die – CPAM et le volet 3 à son employeur. Ce dernier adresse à la caisse une attestation de salaire (Cerfa 11135*04), fixant son accord de principe sur une reprise à temps partiel, la nature de l’em­ploi et sa rémunération.

Attention. L’employeur doit envoyer à la CPAM une nouvelle attestation à chaque changement dans la nature de l’emploi ou de la rémunération.

Cette attestation est cependant établie sous réserve de l’avis du médecin du travail. Sur la base de ces éléments et de l’avis du méde­cin-conseil de la CPAM (portant sur le fait de savoir si la reprise à temps partiel ou le travail lui-même sont de nature à favoriser l’amélioration de l’état de santé de l’assuré), la caisse décide, ou non, la prise en charge et la notifie à l’assuré. L’employeur doit alors organiser une visite de reprise auprès du médecin du travail, afin que celui-ci se prononce sur l’apti­tude du salarié à la reprise dans ces conditions. Si la réponse est positive, le temps partiel thérapeu­tique peut entrer en vigueur.

2. Peut-on refuser cette modalité ?

 Si l’employeur a la possibi­lité de rejeter la demande d’un salarié de passer à temps par­tiel, dans le cas d’un temps partiel thérapeutique la question est plus délicate. Il s’agit en effet de préser­ver la santé du professionnel et de permettre son retour au travail. La Cour de cassation a ainsi eu l’occa­sion, en se fondant sur l’obligation de sécurité de résultat à la charge de l’entreprise, d’accepter la demande en résiliation judiciaire formée par un salarié à l’encontre de son employeur qui s’était oppo­sé à son retour en temps partiel thérapeutique tout en le rémuné­rant mais en le dispensant de tra­vail [4]. Tout refus de reprise dans ces conditions expose donc l’em­ployeur à un risque de recours prud’homal et de condamnation pour non-respect de son obligation de sécurité.

3. Faut-il un avenant au contrat ?

 Aucun texte ne prévoit cette obligation. Pour autant, la reprise à temps partiel thérapeu­tique ne saurait s’analyser, au regard du droit du travail, que comme une modification tempo­raire de la durée du travail, élément essentiel du contrat, qui suppose l’accord du salarié. Par conséquent, il ne peut qu’être recommandé de procéder à la signature d’un ave­nant temporaire. Attention à sa rédaction ! Il conviendra d’y mentionner :

  • sa cause et son caractère temporaire ;
  • le fait que le retour au contrat de travail initial aura lieu dès que la CPAM cessera le versement des IJSS et que le médecin du travail aura levé ses réserves sur l’aptitude du salarié ;
  • la durée de travail à effectuer par le salarié, la répartition des heures et les tâches confiées.

Le tout devant, bien entendu, être conforme aux recommanda­tions du médecin-conseil de la CPAM et du médecin du travail. Dans la mesure où le temps par­tiel thérapeutique intervient à l’initiative du salarié, le respect de la durée minimale de travail heb­domadaire instituée par la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013 n’est pas obligatoire.

4. Quid de la situation financière du salarié ?

 Le professionnel bénéficie de la rémunération corres­pondant à son activité salariée à temps partiel, tout en percevant des IJSS pour la partie non travail­lée de son temps plein initial. La somme de ces deux sources de revenus ne peut en aucun cas être supérieure au salaire antérieure­ment perçu. Le montant des indemnités est fixé par la caisse.

5. Peut-on licencier un salarié en temps partiel thérapeutique ?

 L’employeur peut parfaite­ment licencier un salarié dans ce cas pour un motif personnel ou économique. Néanmoins, sera considéré comme nul, car discrimi­natoire au regard de l’état de santé du salarié, le licenciement fondé sur le temps partiel thérapeutique lui-même (sur la demande de pas­sage à ces conditions en elle-même ou sur le refus par un salarié recon­nu apte au travail uniquement dans ces conditions d’exercer ses fonc­tions à temps plein [5] par exemple) ou, plus globalement, sur l’état de santé du professionnel découlant du temps partiel thérapeutique. Il s’agit donc d’une situation qui implique la plus grande précaution de la part de l’employeur.

6. Et après ?

Attention, la cessation du versement des IJSS ou la mise en invalidité ne peuvent en aucun cas suffire à mettre fin à cet aménagement du temps de tra­vail. En l’absence de dispositions légales ou réglementaires spéci­fiques, ce sont celles de la procé­dure d’aptitude/inaptitude qui s’appliquent.

Au terme de la durée de la mesure fixée par l’avis initial du médecin du travail, bien que les textes ne le prévoient pas, l’em­ployeur doit organiser une nou­velle visite de reprise en vue du retour à temps plein. À la suite à cette visite, qui relève de l’obliga­tion de sécurité de l’employeur, le médecin du travail se prononcera sur l’aptitude ou l’inaptitude du professionnel.

Comment recourir au CDD de remplacement ?

L’employeur a-t-il la possibilité d’utiliser le CDD de remplacement pour compléter le poste d’un salarié qui, après un arrêt, reprend son travail dans le cadre d’un temps partiel thérapeutique ? La réponse est oui. Attention cependant à la rédaction de ce contrat. Celui-ci doit comporter les mentions obligatoires de ce type de CDD, notamment l’identification expresse de la personne remplacée et de sa qualification. Point de vigilance : la Cour de cassation [1] a récemment précisé que le CDD établi pour suppléer un professionnel en temps partiel thérapeutique prend fin au terme de la mesure, même si le salarié remplacé ne reprend pas son poste à temps complet.
[1] Cass. soc. n° 14-10.652 du 23 novembre 2016

Marie Lahémade,
Picard avocats

[1] Cass. civ. 2e ch, n° 16-10.374 du 30 mars 2017,
[2] Code de la Sécurité sociale, art. L323-3
[3] Code de la sécurité sociale, art. L323-1, R323-1 et R323-3
[4] Cass. soc. n° 13-28.792 du 13 mai 2015
[5] Cass. soc. n° 10-15.905 du 11 juillet 2012

Amélie Nadin

Avocat

Amélie est titulaire du Master I  droit privé et carrières judiciaires de l’Université de Versailles Saint-Quentin et du Master II  droit des affaires et du commerce électronique de l’Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne.

Elle s’est spécialisée en droit social lors de sa formation à la Haute Ecole des Avocats Conseils (HEDAC), durant laquelle elle s’est formée au sein d’un grand groupe français et d’un cabinet d’affaires. Après avoir prêté serment en 2019, elle exerce durant 5 ans au sein de deux grands cabinets parisiens spécialisés en droit social. Elle y développe sa pratique du contentieux social individuel et collectif, avant de nous rejoindre en 2024.

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